Revue de presse (RDP)/Actualités Recherche
Revue de presse (avril 1999)
Mis en ligne le 14/04/1999
Auteurs :
Act. Méd. Int. - Hypertension (11), n° 4, avril 1999
82
R e v u e d e p r e s s e
Denis Chemla, Xavier Girerd
Fer et risque de cardiopathie
ischémique : pas d’association
Différentes études épidémiologiques
avaient obtenu des résultats contradic-toires
en faveur ou non d’une associa-tion
entre statut ferrique et risque de
cardiopathie ischémique. Une récente
méta-analyse de douze études prospec-tives
sur ce sujet vient d’être publiée.
Elle a concerné un total de 7 800 sujets
souffrant de cardiopathie ischémique. Ni
la ferritine (n = 570), ni le taux de satura-tion
de la transferrine (n = 6 194), ni les
autres marqueurs reconnus du statut en
fer (capacité totale de fixation, taux
sériques, teneur du régime) ne sont asso-ciés
à un risque accru.
– Danesh J., Appleby P. : Coronary heart
disease and iron status. Meta-analyses of
prospective studies. Circulation, 1999, 99 :
852-4.
D.C.
Blocage des récepteurs AT1
de l’angiotensine II et insuffisance
cardiaque réfractaire
L’équipe new-yorkaise de Thierry Le
Jemtel vient de montrer que le blocage
des récepteurs AT1 de l’angiotensine II
(losartan 50 mg/j pendant six mois)
améliorait les capacités maximales à
l’exercice et la symptomatologie (clas-sification
NYHA) chez des sujets souf-frant
d’insuffisance cardiaque, qui res-taient
nettement symptomatiques mal-gré
des doses maximales d’une trithéra-pie
associant IEC, digoxine et diuré-tiques.
Les auteurs concluent que cet
effet bénéfique, à long terme additif,
obtenu chez 16 patients sous losartan
(versus 17 patients sous placebo) méri-terait
une confirmation sur un échan-tillon
plus large.
– Hamroff G. et coll. : Addition of angiotensin
II receptor blockade to maximal angiotensin-converting
enzyme inhibition improves exercise
capacity in patients with severe heart failure.
Circulation, 1999, 99 : 990-2.
D.C.
Effets bénéfiques de l’exercice phy-sique
et pathologie cardiovasculaire
Si les efforts violents restent déconseillés
au sujet souffrant d’une pathologie car-diovasculaire,
de nombreux travaux plai-dent
en faveur d’un effet bénéfique de
l’exercice physique modéré en préven-tion
primaire (1). Des effets bénéfiques
de l’exercice modéré ont été également
décrits en prévention secondaire, en parti-culier
dans l’insuffisance cardiaque (1-3).
En prévention primaire, ces effets béné-fiques
sont expliqués en partie par la
régression des facteurs de risque, et par
des effets bénéfiques cardiaques (brady-cardie
et modification de la balance sym-patho-
vagale), artériels (baisse de la pres-sion),
veineux (augmentation du tonus) et
liquidiens, par des effets sur la masse
musculaire, la balance énergétique, les
comportements sociaux (mode de vie) et
psychologiques (1). En matière d’exercice,
les principes de base et les règles à res-pecter
concernant en particulier la pro-gressivité
de l’entraînement justifient un
encadrement sérieux pour éviter les
risques inhérents à un effort mal conduit.
Chez l’insuffisant cardiaque (n = 50), un
entraînement modéré prolongé (séances
tri- puis bi-hebdomadaires atteignant
60 % de la VO 2 max, pendant un an) dimi-nue
significativement la morbidité et la
mortalité, comparativement au placebo
(n = 50). Un éditorial (3) souligne les
qualités de cette étude et rappelle les don-nées
de la littérature sur ce thème, en
annonçant l’ouverture d’une ère nouvelle
en matière de prévention secondaire chez
l’insuffisant cardiaque.
1. Shephard R.J., Balady G.J. : Exercise as
cardiovascular therapy. Circulation, 1999,
99 : 963-72.
2. Belardinelli R. et coll. : Randomized,
controlled trial of long-term moderate exercise
training in chronic heart failure. Effects on
functional capacity, quality of life, and clini-cal
outcome. Circulation, 1999, 99 : 1173-82.
3. Coats A.J.S. : Exercise training for heart
failure. Coming of age. Circulation, 1999,
99 : 1138-40.
D.C.
Tabagisme et fibrinolyse endogène
Une fibrinolyse endogène correcte
nécessite un relargage rapide du tPA à
partir de l’endothélium vasculaire.
Newby et coll. ont étudié le débit arté-riel
de l’avant-bras et les facteurs plas-matiques
impliqués dans la fibrinolyse
chez douze fumeurs et douze sujets non
fumeurs appariés en âge et en sexe, qui
ont reçu une perfusion unilatérale de
substance P au niveau de l’artère bra-chiale.
La substance P induit une aug-mentation
dose-dépendante du débit
artériel et du relargage du tPA, signifi-cativement
plus faible chez les fumeurs
comparativement aux non-fumeurs.
Cette baisse aiguë des capacités fibrino-lytiques
pourrait être l’un des méca-nismes
par lequel le tabac et la dysfonc-tion
endothéliale augmentent le risque
d’athérothrombose chez l’homme.
– Newby D.E. et coll. : Endothelial dysfunc-tion,
impaired endogenous fibinolysis, and
cigarette smoking. A mechanism for arterial
thrombosis and myocardial infarction.
Circulation, 1999, 99 : 1411-5.
D.C.
L’hypovolémie contribue à l’hypo-tension
orthostatique du diabétique
Des patients souffrant de diabète sucré
de type 2 avec (n = 10) ou sans (n = 40)
hypotension orthostatique et 40 sujets
83
normaux ont été étudiés en termes de
sodium échangeable, de volume plas-matique,
de volume sanguin total, et de
taux plasmatiques de catécholamines,
de rénine et d’aldostérone. Les diabé-tiques
avec hypotension orthostatique
avaient :
– un volume sanguin diminué de 10 %
comparativement aux contrôles ;
– un sodium échangeable diminué com-parativement
aux diabétiques sans
hypotension orthostatique ;
– une dysautonomie prédominant sur le
système sympathique.
Les complications microvasculaires
étaient plus fréquentes chez les diabé-tiques
avec hypotension orthostatique
(90 %) que chez les diabétiques sans
hypotension orthostatique (35 %). Les
auteurs soulignent l’importance de
l’hypovolémie et de la dysautonomie
dans l’hypotension orthostatique chez
le diabétique.
– Laederach-Hofmann K. et coll. : Hypovolemia
contributes to the pathogenesis of orthostatic
hypotension in patients with diabetes mellitus.
Am. J. Med., 1999, 106 : 50-8.
D.C.
Alcool, AVC, obésité
L’effet protecteur d’une consommation
modérée d’alcool sur la survenue d’un
premier accident vasculaire cérébral
ischémique, mortel ou non, vient d’être
documenté dans une population âgée de
70 ± 13 ans (1). Une étude contrôlée ran-domisée
démontre qu’un inhibiteur de la
lipase gastrointestinale, connu pour dimi-nuer
d’environ 30 % l’absorption des
graisses, assure un contrôle pondéral
satisfaisant et pourrait ainsi diminuer le
risque cardiovasculaire (2). Un éditorial
met en doute la pertinence de l’étude, en
particulier du fait d’un nombre important
d’arrêts ou de sorties d’étude, et insiste
une nouvelle fois sur la nécessité de la
prévention primaire (3).
1. Sacco R.L. et coll. : The protective effect of
moderate alcohol consumption on ischemic
stroke. JAMA, 1999, 281 : 53-60.
2. Davidson M.H. et coll. : Weight control and
risk factor reduction in obese subjects treated
for 2 years with orlistat. A randomized
controlled trial. JAMA, 1999, 281 : 235-42.
3. Williamson D.F. : Pharmacology for obesity.
JAMA, 1999, 281 : 278-9.
D.C.
Les bénéfices des antagonistes
calciques pour les diabétiques
de l’étude Syst-Eur
Si la “controverse” au sujet des antago-nistes
calciques a été largement relayée
en Europe, elle a eu toutefois un impact
plus faible qu’en Amérique du Nord. La
dernière publication de l’étude Syst-Eur
va apporter des arguments objectifs
en faveur de l’efficacité et de la tolé-rance
des dihydropyridines chez des
sujets pourtant à haut risque de maladie
cardiovasculaire, les hypertendus âgés
diabétiques (10,4 % de la population
dans l’étude Syst-Eur). Les bénéfices
du traitement par la nitrendipine seule
(56 %) ou associée soit à l’énalapril
(27 %) soit à l’énalapril et à l’hydro-chlorothiazide
(15 %) ont été comparés
à la prescription d’un placebo. Après un
suivi moyen de deux années, la pression
artérielle a diminué de façon compa-rable
dans le groupe des diabétiques et
des non-diabétiques (- 23/- 7 mmHg),
et le traitement actif a été significative-ment
plus hypotenseur que le placebo
(- 13/- 2 mmHg). Chez l’hypertendu
diabétique le risque absolu d’un événe-ment
cardiovasculaire est presque deux
fois plus élevé que chez le non-diabé-tique
(58 versus 31 pour 1 000 patients-année),
et le bénéfice du traitement est
également plus important qu’il soit
exprimé en termes de bénéfice absolu
(36 versus 8 pour 1 000 patients-
année), ou en termes de bénéfice relatif
(62 % versus 25 %). Ce bénéfice est
significatif pour les AVC et frôle la
significativité statistique pour les com-plications
cardiaques (p = 0,06). Les
auteurs ont de plus réalisé une compa-raison
historique entre les bénéfices
obtenus chez les hypertendus âgés dia-bétiques,
traités dans l’étude SHEP, et
ceux obtenus par les patients traités
dans l’étude Syst-Eur. Les bénéfices
sont plus importants dans l’étude Syst-Eur
que dans l’étude SHEP !
L’information mérite réflexion car le
traitement antihypertenseur dans l’étude
SHEP comportait des diurétiques thia-zidiques
à faible dose combinés à un
bêta-bloquant. Les antagonistes cal-ciques
seraient donc plus protecteurs
que les diurétiques. Ce scoop sera
confirmé ou infirmé par l’étude STOP-2
dont les résultats sont attendus en juin
prochain au congrès de l’ESH. En
attendant, ce nouveau résultat de l’étude
Syst-Eur nous indique que la controver-se
sur les antagonistes calciques a vrai-ment
du plomb dans l’aile !
– Tuomilehto J et coll. : Effects of calcium-channel
blockade in older patients with dia-betes
and systolic hypertension N. Engl. J.
Med., 1999, 340 : 677-84.
X.G.
Croire ou ne pas croire les relevés
d’automesure tensionnels faits par
les patients ?
L’automesure tensionnelle est la mesure
volontaire de la pression artérielle effec-tuée
par un sujet, à son domicile, dans des
conditions standardisées. Cette méthode
d’évaluation de la pression artérielle, réa-lisée
en dehors du cabinet médical, pos-sède
une excellente fiabilité et une très
bonne reproductibilité si un “protocole
d’automesure” a été expliqué au patient
(trois mesures le matin et trois mesures le
R e v u e d e p r e s s e
Act. Méd. Int. - Hypertension (11), n° 4, avril 1999
84
soir, en position assise, pendant au moins
trois jours consécutifs). Une bonne colla-boration
du patient est indispensable à la
qualité du recueil des données. Une équi-pe
allemande a testé la qualité du recueil
des mesures effectuées par des hyperten-dus
volontaires (mesure pendant deux
semaines de leur pression artérielle par
automesure). Les valeurs de pression
artérielle fournies par le patient étaient
comparées à celles mémorisées par l’ap-pareil
à son insu.
La principale attitude des sujets est de ne
pas recopier toutes les mesures effec-tuées,
et en moyenne 36 % des mesures
ne sont pas notées sur le carnet de sur-veillance.
A contrario, des mesures fac-tices
sont parfois notées sur le carnet de
surveillance, mais cette situation est
beaucoup plus rare (en moyenne 9 % des
mesures). Lorsque les valeurs sont
notées, leur concordance avec les véri-tables
mesures est de 76 %, mais cette
concordance est supérieure à 90 % chez
un sujet sur deux. Aucune caractéristique
démographique ne permet de prédire la
qualité de la transcription des données.
Enfin, malgré ces discordances, la valeur
moyenne de la pression artérielle calculée
à partir du carnet de surveillance n’est pas
différente de celle calculée sur toutes les
mesures réellement effectuées. Cette
étude démontre que certains des biais liés
à l’observateur sont aussi rencontrés avec
l’automesure. Si l’automesure est utilisée
dans le cadre d’un essai thérapeutique, le
choix d’un appareil qui comporte une
mémoire est préférable afin de faire dis-paraître
l’incertitude quant à la transcrip-tion
des mesures effectuées par le patient.
– Mengden T. et coll. : Reliability of reporting
self-measured blood pressure values by
hypertensive patients. Am. J. Hypertens.,
1998, 11 : 1413-7.
X.G.
Faut-il traiter les hypertendus
après 80 ans ?
A la question du bénéfice du traitement
des hypertendus “très âgés”, il est clas-
sique de répondre que les données
scientifiques sont trop peu nombreuses
pour permettre des recommandations
indiscutables. Le sujet “très âgé” est
arbitrairement défini comme ayant plus
de 80 ans. Plusieurs essais randomisés
réalisés chez l’hypertendu âgé ont en
fait inclus des sujets dans cette catégo-rie.
François Gueyffier a réalisé la col-lecte
des données de sept études per-mettant
de disposer d’informations sur
1 670 sujets hypertendus, âgés de plus
de 80 ans. Une méta-analyse a été réali-sée
à partir de données individuelles
avec comme objectif la comparaison
des événements cardiovasculaires sur-venus
chez 874 sujets hypertendus trai-tés
par des antihypertenseurs et chez 796
hypertendus non traités par des médica-ments
actifs. La mortalité cardiovasculaire
a été de 15 % et la mortalité totale de
28 % sur une période moyenne de 3,5
années. L’analyse a porté principalement
sur la prévention des AVC, et il a été
montré que le traitement diminue de
34 % le risque d’AVC mortel ou non
(IC : 95 % ; 8 à 52). Lorsque d’autres
complications sont analysées, il apparaît
que l’insuffisance cardiaque est préve-nue
dans 39 % des cas (p = 0,01), alors
que la mortalité totale n’est pas augmen-tée
de façon significative + 6 % (IC :
95 % ; - 5 à + 18). Ainsi, cette méta-ana-lyse
apporte de nouveaux arguments
pour considérer qu’il n’y a pas d’âge au-delà
duquel le traitement antihyperten-seur
ne serait plus utile en matière de pré-vention
des deux complications de l’hy-pertension
les plus fréquentes chez l’hy-pertendu
très âgé : l’accident vasculaire
cérébral et l’insuffisance cardiaque. Ces
résultats suggèrent qu’il n’est peut-être
plus éthique de proposer à des hyperten-dus
de plus de 80 ans de ne pas être trai-té
par un médicament actif. La justifica-tion
de l’étude HYVET, qui devrait
débuter prochainement et qui veut com-parer
un traitement par indapamide au
placebo, se trouve probablement posée
par les résultats de cette analyse.
– Gueyffier F. et coll. : Antihypertensive drugs
in very old people : a subgroup meta-analysis
of randomized controlled trials. Lancet,
1999,353 : 793-6.
X.G.