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La corticothérapie en question


La dose d’une corticothérapie orale instaurée en relais d’un corticoïde en bolus intraveineux pour le traitement des exacerbations aiguës (EA) survenant au cours des pneumopathies interstitielles idiopathiques influence-t-elle le pronostic des patients ? Afin de répondre à cette question, une équipe japonaise a évalué de façon rétrospective les facteurs ayant influencé la mortalité de 85 patients présentant une EA de FPI (n = 63 ; groupe EA-FPI) ou d’une autre pneumopathie interstitielle idiopathique (n = 22 ; groupe EA-non FPI), traités par 1 g de corticoïde en bolus intraveineux pendant 3 jours, puis par un corticoïde oral administré à une dose initiale de 0,5 à 1 mg/kg/j (en association à un traitement immunosuppresseur chez 46 patients, à une ventilation mécanique chez 35 patients ou à une hémoperfusion sur colonne d’antibiotique chez 21 patients) (1). La survie médiane a été de 49 jours, sans différence significative entre les patients du groupe EA-FPI (49 jours) et ceux du groupe EA-non FPI (39 jours). En analyse multivariée, les facteurs de mauvais pronostic comportaient l’utilisation d’une oxygénothérapie de longue durée avant la survenue de l’EA, un taux bas d’Ig G, un taux élevé de la protéine D du surfactant pulmonaire et l’existence d’une atteinte diffuse au scanner au moment du diagnostic de l’EA ainsi que la mise en place d’une ventilation mécanique pour le traitement de l’EA. Après ajustement sur ces facteurs pronostiques, l’utilisation d’une forte dose de corticothérapie orale (≥ 0,6 mg/kg) a été significativement associée à une amélioration de la survie dans le groupe des patients non ventilés lors du traitement de l’EA (HR = 0,429 ; IC95 : 0,204-0,903 ; p = 0,026). Elle n’avait en revanche aucune valeur pronostique dans l’ensemble de la cohorte (HR = 0,775 ; IC95 : 0,454-1,323 ; p = 0,350), ni chez les patients ventilés (HR = 1,623 ; IC95 : 0,619-4,255 ; p = 0,324).

Quelles implications pour la pratique ? 

Bien qu’aucun essai contrôlé ne permette de juger de son efficacité, une corticothérapie à posologie élevée est souvent utilisée lors du traitement des EA de FPI, par analogie avec le syndrome de détresse respiratoire aiguë et parce que la composante de pneumopathie organisée retrouvée chez certains patients peut être corticosensible (2-5). Elle est parfois bénéfique, ce qui explique qu’elle soit proposée par les recommandations (2, 4). En pratique, le schéma thérapeutique habituel (mais non validé) comporte 500 mg à 1 g de corticoïde en bolus intraveineux les 3 premiers jours, suivis d’une corticothérapie orale à la dose initiale de 1 mg/kg/j puis à posologie progressivement décroissante pendant une durée pouvant aller jusqu’à 6 mois (6-8). L’étude suggère la validité de l’administration d’une corticothérapie orale initialement à forte dose, mais ses résultats sont à prendre avec précaution compte tenu, notamment, du caractère rétrospectif de l’analyse effectuée, de l’hétérogénéité de la population évaluée (patients atteints d’une FPI ou d’une autre pneumopathie interstitielle idiopathique non FPI), de l’absence de données sur l’effet de la dose totale cumulée du traitement par corticoïde et de la possibilité d’un biais lié à un meilleur pronostic chez les patients non pris en charge par ventilation mécanique (9, 10). Le débat sur l’utilisation, la dose et la durée d’une corticothérapie au cours du traitement des EA de FPI ne semble donc pas clos, et des études contrôlées prospectives sont encore nécessaires (7, 9, 10).  

20-0072-02/2020 Boehringer Ingelheim France SAS


Références

  1. Arai T et al. High-dose prednisolone after intravenous methylprednisolone improves prognosis of acute exacerbation in idiopathic interstitial pneumonias. Respirology 2017;22:1363-70. 
  2. Raghu G, Collard HR, Egan JJ et al. An official ATS/ERS/JRS/ALAT statement: idiopathic pulmonary fibrosis: evidence-based guidelines for diagnosis and management. Am J Respir Crit Care Med 2011;183:788-824.
  3. Johannson K, Collard HR. Acute exacerbation of idiopathic pulmonary fibrosis: a proposal. Curr Respir Care Rep 2013:2(4).
  4. Cottin V et al. Recommandations pratiques pour le diagnostic et la prise en charge de la fibrose pulmonaire idiopathique – Actualisation 2017. Version longue. Rev Mal Respir 2017;34:900-68.
  5. Ryerson CJ et al. Acute exacerbation of idiopathic pulmonary fibrosis: shifting the paradigm. Eur Respir J 2015;46:512-20.
  6. Pastré J et al. Exacerbation aiguë de fibrose pulmonaire idiopathique. La Lettre du Pneumologue 2017;6:252-6.
  7. Kondoh Y et al. Recent lessons learned in the management of acute exacerbation of idiopathic pulmonary fibrosis. Eur Respir Rev 2017;26(145). 
  8. Kishaba T. Acute exacerbation of idiopathic pulmonary fibrosis. Medicina (Kaunas) 2019;55(3). 
  9. Sellarès J, Bermudo G. Corticosteroids in acute exacerbations of idiopathic interstitial pneumonias: time to debate. Respirology 2018;23:546.
  10. Arai T, Inoue Y. Corticosteroids in acute exacerbations of idiopathic pulmonary fibrosis: time to debate – Reply. Respirology 2018;23:546-7.

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