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Rupture de tolérance et auto-immunité : l’interféron est dans l’AIRE

D‘après Adrian Hayday (Londres)

Le syndrome APECED (Autoimmune Polyendocrinopathy Candidiasis Ectodermal Dystrophy) résulte de la mutation du gène AIRE (AutoImmune Regulator). Ce dernier joue un rôle clé dans les mécanismes de tolérance centrale (thymus) en permettant une sélection négative (élimination) des lymphocytes T autoréactifs. Il s’agit d’une maladie monogénique de transmission autosomique récessive, avec un phénotype associant typiquement (mais en fait rarement) la triade hypoparathyroïdie-maladie d’Addison-candidose cutanéomuqueuse.

En cas d’APECED, la présentation des antigènes par le complexe majeur d’histocompatibilité est altérée. Un déficit de l’éducation lymphocytaire T existe alors, dont il résulte une tolérance accrue envers le soi, avec la formation d’autoanticorps impliqués dans de nombreuses maladies auto-immunes connues (autoréactivité globale) [figure 1].

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Chez ces patients ont été décrits différents anticorps anticytokines, comme des anti-IL-17 (responsables des candidoses) mais aussi des anti-IFNα, qui sont intéressants à plus d'un titre :

  • dans l’APECED, la présence de ces autoanticorps anti-IFNα pourrait expliquer le fait que, dans une maladie génétique caractérisée par un défaut profond de contrôle de la tolérance immune, il n’y a pas de manifestations auto-immunes systémiques de type lupus ou myopathies inflammatoires. Ces autoanticorps anti-IFNα sont peut-être “protecteurs” ;
  • Ces anticorps de très haute spécificité pourraient être utiles pour “fabriquer” des méthodes de dosage de l’IFNα. L’interféron de type I (essentiellement IFNα et IFNβ) est une molécule présente dans l’organisme à des concentrations infimes, rendant son dosage sérique très difficile. Une technique récente élaborée par Yanick Crowe et Darragh Duffy (SIMOA pour Single Molecule Assay) en offre cependant la possibilité et a permis de mesurer l’activité de cette cytokine dans différentes pathologies (en utilisant des anticorps anti-IFNα) [1] ;
  • La notion d’interféronopathies émerge dans le monde de l’auto-immunité, correspondant à un groupe de maladies caractérisées par une “signature interféron” de type 1. Ce spectre de maladies contient des maladies pédiatriques à signature interféron forte comme les différents syndromes d’Aicardi-Goutières (AGS), le SAVI (STING-associated vasculopathy with onset in infancy) ou la dermatomyosite juvénile, mais également des pathologies de l’adulte comme le syndrome de Goujerot-Sjögren et le lupus érythémateux disséminé (figure 2) [2]. Les techniques de type SIMOA pourraient permettre de faciliter leur diagnostic. L’anticorps anti-IFNα des patients atteints d’APECED pourrait permettre de différencier plusieurs sous-groupes de patients au sein d’une même maladie (par exemple, le lupus) et d'essayer de bloquer cette signature par des anticorps spécifiques.

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Au final, la découverte des mécanismes et des conséquences immunologiques de l’APECED est une formidable opportunité pour mieux comprendre certaines maladies auto-immunes.


Références

1. Rissin DM, Kan CW, Campbell TG et al. Single-molecule enzyme-linked immunosorbent assay detects serum proteins at subfemtomolar concentrations. Nat Biotechnol 2010;28:595-9. 

2. Rodero MP, Decalf J, V Bondet. Detection of interferon alpha protein reveals differential levels and cellular sources in disease. J Exp Med 2017;214(5):1547-55. 


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