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Implication pronostique de la cinétique d’élimination de l’ADN tumoral circulant en situation néoadjuvante


Le suivi de l’ADN tumoral circulant (ADNtc) est une technique ayant fait ses preuves pour détecter une maladie résiduelle ou encore suivre une progression de maladie ou l’apparition d’un événement en faveur d’une résistance thérapeutique (mutation d’ESR1) en cas de cancer avancé.

En parallèle, les prises en charge par chimiothérapie néoadjuvante sont devenues un standard dans de nombreux cas de cancer du sein permettant de réaliser une chirurgie conservatrice en diminuant la taille tumorale, tout en évaluant l’efficacité intrinsèque des traitements mis en œuvre. Il a été démontré depuis de nombreuses années que la réponse complète histologique (RCH) était corrélée à la survie sans rechute.

Cette étude ancillaire rétrospective (1) s’intéresse au rôle de l’ADNtc comme biomarqueur de réponse à la chimiothérapie néoadjuvante et à la valeur ajoutée de l’ADNtc en cas de non PCR.

Les patientes incluses dans l’essai I-PSY 2 (NCT01042379) présentant une tumeur de plus 2,5 cm de stade II ou III et un risque de récidive élevé (score Mammaprint élevé) ont été analysées. Le traitement de chimiothérapie néoadjuvante pouvait être couplé à un inhibiteur d’AKT (MK-2206).

Quatre prélèvements d’ADNtc étaient effectués : avant chimiothérapie (T0), après 3 semaines de traitement (T1), entre anthracyclines et taxanes (T2) et avant chirurgie (T3). Une analyse d’exome était réalisée, permettant d’identifier les 16 mutations les plus fréquentes par cas. Ces variants étaient ensuite recherchés sur ADNtc par PCR.

84 patientes ont pu être incluses dont 35 % de tumeurs luminales, 23 % d’HER2 positives et 43 % de triple-négatives. 53 % des patientes ne présentaient pas d’atteinte ganglionnaire.

Les résultats retrouvent une corrélation entre détection d’ADNtc avant chimiothérapie néoadjuvante (T0) et le phénotype (triple-négatif ou HER2 positif) ainsi qu’avec la taille tumorale, notamment.

Dans l’ensemble de la population, l’ADNtc était détecté de manière décroissante sous traitement, 73 % à T0, 35 % à T1, 14 % à T2 (entre taxanes et anthracyclines) et enfin 9 % à T3 avant chirurgie.

L’absence d’élimination de l’ADNtc à 3 semaines (T0) était associée à l’absence de RCH (RR = 4,33 ; p = 0,012, ajustement fait sur le traitement reçu et le sous-type).

Avec un suivi médian de 4,8 ans, 8 patientes ont présenté une rechute locale et 10 une rechute métastatique. 75 % et 90 % de ces patientes ont présenté respectivement une détection d’ADNtc à au moins un temps de recueil. Les patientes en rechute présentent donc très fréquemment une absence d’élimination de détection d’ADNtc pendant la chimiothérapie néoadjuvante.

Les auteurs ont recherché l’intérêt d’une analyse dynamique de la perte de détection d’ADNtc. Ils retrouvent qu’une perte de détection au temps T1, T2 ou T3 réduit le risque de rechute métastatique pour le ramener au risque des patientes avec ADNtc indétectable à T0 (inclusion). Au contraire, en cas de détection toujours présente à T3, le risque de rechute à distance était significativement élevé (HR = 22,4 ; IC95 : 2,5-201 ; p < 0,001). De manière intéressante, plus la perte de détection de l’ADNtc était tardive pendant la chimiothérapie première, plus le risque de rechute à distance apparaît important.

Le point le plus intéressant est le fait que les patientes n’ayant pas présenté de RCH, mais dont l’ADNtc était rendu indétectable pendant la séquence de chimiothérapie (avant ou au temps T3), présentaient un risque de rechute métastatique identique à celui des patientes en RCH.

Ce que cet article apporte à ma pratique : 

  • L’ADNtc est détectable chez environ 70 % des patientes considérées à haut risque donc candidates à une chimiothérapie néoadjuvante. 
  • Une analyse personnalisée des variants recherchés sur biopsie liquide (adapté à l’étude de l’exome de chaque tumeur) présente probablement un grand intérêt par rapport à une recherche de variants classique type panel de gènes. 
  • Une analyse dynamique de l’élimination de l’ADNtc retrouve une réduction du risque de rechute à distance d’autant plus que l’élimination est précoce.
  • Le sous-groupe des patientes ne présentant pas de RCH peut être dissocié en fonction de l’élimination de la détection d’ADNtc. Un pronostic identique aux patientes en RCH en termes de rechute à distance est retrouvé en cas de perte de de l’ADNtc pendant la période de chimiothérapie néoadjuvante.

À retenir

Cette étude montre un intérêt temporel à la perte de détection de l’ADNtc sous chimiothérapie en terme de pronostic avec une technique peu invasive pour nos patientes permettant d’entrevoir des adaptations thérapeutiques très précoces en néoadjuvant. La possibilité de redresser le pronostic de patientes ne présentant pas de réponse complète histologique mais une élimination de détection de l’ADNtc pourrait permettre de stratifier au mieux les patientes nécessitant un traitement post néoadjuvant à l’avenir. La preuve de l’utilité clinique de ces hypothèses devra faire l’objet de recherches prospectives.



Références

1. Magbanua MJM et al. Circulating tumor DNA in neoadjuvant-treated breast cancer reflects response and survival. Ann Oncol 2020;S0923-7534(20)43162-X.


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