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Quelle démarche diagnostique et pronostique face à une myopathie inflammatoire ?

D’après Yves Allenbach (Paris)


Les myopathies inflammatoires représentent un groupe de pathologies hétérogènes dont la classification a évolué récemment, à la faveur d’une meilleure description clinique, des avancées histologiques et de la découverte de nouveaux autoanticorps. Une démarche diagnostique méthodique permet de préciser le caractère inflammatoire d’une maladie musculaire et de la rattacher à un sous-groupe bien défini.

Quatre principaux éléments permettent de s’orienter :

  • le mode de début, aigu ou subaigu, est évocateur d’une myopathie acquise possiblement inflammatoire, ce qui permet, avec la recherche d’antécédents familiaux, la distinction avec les affections musculaires génétiques ou métaboliques ;
  • l’existence de symptômes extramusculaires, cutanés ou articulaires, permet de suspecter une dermatomyosite ou un syndrome des antisynthétases ; 
  • la détection d’autoanticorps associés aux myosites est déterminante pour préciser le diagnostic, classer au mieux le type de myopathie inflammatoire, apporter des éléments pronostiques servant à guider les examens complémentaires et, quelquefois, adapter la conduite thérapeutique. Ces autoanticorps sont identifiés en pratique quotidienne, à l’aide de kits de détection “immuno-dots” ou “dots-myosites”. Les principales spécificités associées aux myopathies inflammatoires permettent de distinguer le groupe des polymyosites, dont le syndrome des antisynthétases (anti-JO1, -PL7, -PL12, -EJ, -OJ, -KS, -JS, -ZO), les myosites nécrosantes à médiation immune (anti-SRP, -HMGCR) et les dermatomyosites (anti-Mi2, -NXP2, -TIF1y, -MDA5). Ces autoanticorps sont très spécifiques d’un groupe de myopathies inflammatoires, souvent mutuellement exclusifs et quelquefois associés à un phénotype clinique très évocateur comme, par exemple, les lésions de calcinose des dermatomyosites à anti-NXP2, les lésions d’hyperkératose fissuraire des doigts et les papules palmaires à centre ivoire des dermatomyosites à anti-MDA5 ;
  • lorsque l’atteinte musculaire est au premier plan, avec une élévation marquée des CPK (souvent au-delà de 5 000 UI/l), une myosite nécrosante à médiation immune doit être évoquée. La biopsie musculaire confirme la présence de fibres en nécrose qui expriment l’HLA de classe I. Ces formes nécrosantes sont associées à la présence d’anticorps anti-SRP ou anti-HMGCR (induits ou non par la prise de statines). Certains anticorps rencontrés dans d’autres connectivites, tels anti-RNP ou anti-Ku, peuvent aussi être responsables de formes nécrosantes.


Les critères de gravité des myopathies inflammatoires doivent être connus et recherchés systématiquement :

  • l’atteinte de la musculature pharyngée peut être responsable de fausses routes que l’on peut dépister en consultation par un test de déglutition (test au verre d’eau) ;
  • des manifestations respiratoires peuvent témoigner de l’implication de la musculature diaphragmatique, mais aussi d’une pneumopathie interstitielle (non spécifique, comme dans le syndrome des antisynthétases, ou organisée, comme dans les dermatomyosites à anti-MDA5).  L’atteinte pulmonaire interstitielle grève fortement le pronostic des dermatomyosites, en particulier à anti-MDA5, qui nécessitent une immunosuppression, comprenant au  maximum : échanges plasmatiques, Ig i.v., bolus de corticoïdes, cyclophosphamide et inhibiteurs des calcineurines (ciclosporine ou tacrolimus). L’atteinte pulmonaire interstitielle n’existe pas dans les formes associées aux anti-HMGCR, alors qu’elle peut être observée dans 20 % des formes à anti-SRP, sans qu’elle nécessite de traitement particulier ;
  • la dyspnée peut aussi révéler une atteinte myocardique dans les myosites nécrosantes à anti-SRP, bien que celle-ci soit rare ; 
  • certaines myopathies inflammatoires peuvent révéler un cancer qui doit être recherché. Ce risque concerne essentiellement les dermatomyosites avec anticorps anti-TIF1y, -Mi2 et -NXP2. Le risque néoplasique est à considérer surtout après 50 ans, dans les 2 à 3 ans qui encadrent le diagnostic, et ne concerne pas les formes juvéniles. 

Au final, la classification des myopathies inflammatoires a “explosé” avec une dissection histopathologique, immunologique et même moléculaire. Cette dissection a des conséquences cliniques et thérapeutiques majeures. 

Le rhumatologue peut être confronté en pratique quotidienne aux MI, par leur mode d’entrée musculaire avec des myalgies et une élévation des CPK mais aussi articulaire avec parfois une authentique polyarthrite séronégative révélatrice de syndrome des anti synthétases ou de dermatomyosite à anti-MDA5.
Il doit savoir évoquer le diagnostic, puis s’aider des manifestations cliniques, du dosage des auto-anticorps et si besoin d’une biopsie musculaire pour s’orienter vers un sous-groupe de MI. Une fois le diagnostic posé et au cours du suivi il conviendra d’éliminer systémiquement les complications potentiellement associées.


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