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Un essai prospectif du vaccin anti-SARS-CoV-2 évaluant également le bénéfice d’une 3e dose chez les patients atteints de CBNPC
La mortalité par Covid chez les patients atteints de CBNPC est d’environ 30 % par rapport au 0,7-8 % pour la population générale. Les patients ayant des cancers ont été exclus des études princeps des différents vaccins et nous avons des données concernant la grippe validant le fait que la réponse vaccinale est moindre notamment chez les plus de 65 ans. Par ailleurs, le timing pour l’injection du vaccin n’est pas bien défini et nous ne savons pas si l’immunothérapie engendre un sur-risque d’effets indésirables.
Cette étude [1] a été menée de façon prospective à l’hôpital Bichat entre janvier 2021 et juillet 2021 et rapporte 306 patients porteurs d’un cancer thoracique. Pour être éligible, les patients devaient avoir une espérance de vie > 3 mois et ne devaient pas avoir eu une infection à Covid-19 dans les 3 mois précédents. Une vaccination contre la Covid-19 leur a été proposée, avec l’ordre de priorité suivant : patients âgés de 75 ans ou plus, recevant une chimiothérapie, des ICI, pneumonectomisés ou ayant une pneumopathie postradique, traités par ITK et ceux sans traitements. Une sérologie et une NFS étaient réalisées à J0, J28 et J42. Pour comparaison, 18 volontaires du personnel médical sans pathologies ont eu une prise de sang à J28.
L’objectif principal était d’évaluer la réponse humorale anti-spike après 2 doses du vaccin Pfizer (mais 1 et 3 patients ayant reçu respectivement du Moderna et AstraZeneca ont été inclus). Les objectifs secondaires étaient la sécurité du vaccin et son efficacité.
Parmi les 306 patients, 43 avaient déjà eu une infection par le Covid-19 et ont donc reçu une seule dose du vaccin, selon les recommandations. On dénombrait 181 hommes (59,2 %) et 285 cancers du poumon dont 260 CBNPC (84,9 %) et 22 CBPC (7,2 %), le reste était des mésothéliomes pleuraux malins. L’âge médian était de 67 ans, mais il faut noter que 41 % des patients avaient plus de 70 ans. 57,2 % des patients avaient un cancer avancé, pour lequel 16,7 % avaient reçu une chimiothérapie seule, 7 % en combinaison avec l’immunothérapie, 16 % une immunothérapie seule et 14 % par ITK ou bévacizumab en maintenance, dans les 3 mois de la première injection de vaccin. 12 % avec une pneumopathie radique, 89 avaient été opérés (dont 6 par pneumonectomie) et 20 patients (6,5 %) étaient sous corticoïdes.
Le suivi médian était de 202 jours et le taux médian d’anticorps anti-S était de 149,7 AU/mL (IQR : 21,9-436,1) vs 913 AU/mL (IQR : 438,3-1 859,3) chez les contrôles. Notons que 91 patients avaient une sérologie négative. Deux semaines après la 2e dose, soit J42, le titre médian en anticorps anti-S était de 4 725 AU/mL (IQR : 1 066-13,698) ; cependant 34 patients avaient un titre < 300 AU/mL (considéré comme le seuil pour neutraliser convenablement le virus) et 17 patients conservaient une sérologie négative. Concernant l’efficacité durant les 6 mois de suivi, seulement 8 patients ont été infectés (forme légère).
La tolérance du vaccin était bonne avec de façon prédominante des douleurs au point d’injection.
Les facteurs cliniques influençant à J42 l’absence (< 50 AU/mL) ou une faible (< 300 AU/mL) réponse humorale étaient en analyse univariée : l’âge, la chimiothérapie, l’absence de contrôle de la maladie et une corticothérapie. En analyse multivariée, l’âge et l’utilisation de corticoïdes restaient des facteurs de risque de mauvaise réponse humorale.
Une troisième dose a été proposée à 30 patients ayant un taux < 300 AU/mL à J42, sur la base d’une étude israélienne. Une nouvelle sérologie était réalisée 28 jours après la 3e dose chez 26 patients. 19 et 4 avaient respectivement une augmentation majeure (> 3 500 AU/mL) et modéré (entre 300 et 1 000 AU/mL). Les 3 patients qui avaient un taux < 50 AU/mL persistant après une 3e injection présentaient des affections hématologiques (hémopathie ou DICV).
Ce que cet article apporte à ma pratique :
- Cette étude est la plus importante évaluant la vaccination chez les patients atteints de cancer thoracique.
- Elle montre l’efficacité de la vaccination dès la 2e dose et est en faveur d’une 3e en l’absence de réponse.
- Les patients développant un Covid (n = 8) semblent par ailleurs faire des formes légères.
- Il faut penser à réaliser une sérologie chez les patients sous corticoïdes au long cours, sous chimiothérapie et chez ceux âgés et ne pas oublier les anticorps préventifs tels que casirivimab/imdévimab ou tixagévimab/cilgavimab.
Références
1. Gounant V et al. Efficacy of severe acute respiratory syndrome coronavirus-2 vaccine in patients with thoracic cancer: a prospective study supporting a third dose in patients with minimal serologic response after two vaccine doses. J Thorac Oncol 2022;17(2):239-51.