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Le trastuzumab déruxtécan arrive en 2e ligne : la révolution est en marche
L’étude de phase DESTINY-BREAST 01 [1] avait positionné le trastuzumab déruxtécan (T-DXd) en 3e ligne et ultérieure des cancers du sein avancés HER2 amplifié. Les résultats impressionnants, avec un taux de réponse de 60,9 % et une survie sans progression (SSP) de 16,4 mois chez des patientes lourdement prétraitées, avaient mis en lumière l’intérêt majeur de cette molécule.
Il était donc logique de voir le T-DXd tenter de remonter les lignes. L’étude DESTINY-BREAST 03 [2] a comparé le trastuzumab emtansine (T-DM1, traitement de référence en 2e ligne) au T-DXd dans une étude de phase III randomisée.
L’étude incluait des patientes progressives après une 1re ligne de maladie avancée par taxanes et trastuzumab ou progressant dans les 6 mois suivant la fin d’un traitement identique mais en adjuvant ou néoadjuvant. La présence de métastases cérébrales était possible seulement en cas de maladie cérébrale contrôlée (précédemment traitée). Le critère de jugement principal était la SSP.
524 patientes ont été incluses. Environ 50 % des patientes n’avaient reçu qu’une seule ligne de traitement et environ 60 % avaient reçu du pertuzumab. 23,8 % (bras T-DXd) et 19,8 % (bras T-DM1) présentaient une maladie cérébrale stabilisée à l’inclusion. Les résultats ici présentés tiennent compte d’un suivi médian de 16 mois.
L’étude est largement positive en faveur du bras T-DXd avec en SSP médiane non atteinte (IC95 : 18,5-non estimable) versus 6,8 mois (IC95 : 5,6-8,2) dans le bras T-DM1 (analyse centralisée). Le HR est de 0,28 (IC95 : 0,22-0,37 ; p < 0,001), soit une réduction du risque relatif de progression ou de décès de 72 % pour le T-DXd. La SSP basée sur analyse des investigateurs était de 25,1 mois versus 7,2 mois. Un autre chiffre démonstratif est celui du taux de patientes non progressives à 1 an : 75,8 % versus 34,1 %. Le bénéfice est retrouvé dans l’ensemble des sous-groupes. Les données de survie globale ne sont pas encore matures. Enfin, 96,6 % des patientes bénéficiaient une maladie contrôlée, en réponse ou a minima stable.
Sur le plan de la tolérance, il y a eu plus d’arrêts de traitement liés à un effet secondaire avec le T-DXd (13,6 versus 7,3 %). Les effets secondaires les plus décrits sous T-DXd étaient les nausées (72,8 % des patients), la fatigue (44,7 %) et les vomissements (44 %) ; ces effets secondaires étant plus fréquents que sous T-DM1. Les neutropénies de grade 3 ou 4 étaient également plus fréquentes sous T-DXd (19,1 versus 3,1 %). Concernant les pneumopathies interstitielles, les données sont rassurantes puisque sur les 27 patientes (10,5 %) dans le bras T-DxD qui en ont présenté une, la majorité était de grade 1 ou 2 (grade 1, n = 7 ; grade 2, n = 18 et grade 3, n = 2). Dans le bras T-DM1, 5 patientes ont été concernées (1,9 %) (grade 1, n = 4 et grade 2, n = 1). Il n’y a pas eu de cas de grade 4 ou 5. Cette toxicité a mené à 8,2 % d’arrêt de traitement dans le bras T-DXd. La toxicité cardiaque n’était pas différente selon le bras de traitement.
Ce que cet article apporte à ma pratique
- Le T-DXd devient le nouveau standard de 2e ligne avancée des tumeurs HER2 amplifié en surclassant le standard actuel, T-DM1, avec un HR = 0,28 en SSP.
- Le bénéfice est retrouvé pour tous les sous-groupes, RH+ ou RH–, prétraitées par pertuzumab ou non, avec ou sans métastases cérébrales.
- Les données de survie globale sont attendues car encore immature.
- Attention au suivi de la tolérance avec notamment un scanner thoracique tous les 2 cycles pour dépister les pneumopathies interstitielles.
À retenir
Avec une réduction du risque relatif de progression ou de décès de 72 %, le T-DXd devient la molécule incontournable de 2e ligne, même si le remboursement dans cette indication est encore en attente. Le positionnement en ligne plus précoce voire pour les maladies localisées est en cours d’investigation. Nous savons d’ores et déjà que la révolution T-DXd ne s’arrêtera pas aux tumeurs HER2 amplifié devant les données positives partiellement présentées dans les tumeurs dites HER2 faible (ou HER2 low, soit 1+, 2+ avec FISH négative) (études DESTINY-BREAST 04 et Daisy).
Références
1. Modi S et al. Trastuzumab deruxtecan in previously treated HER2-positive breast cancer. N Engl J Med 2020;382:610-21.
2. Cortés J et al. Trastuzumab deruxtecan versus trastuzumab emtansine for breast cancer. N Engl J Med 2022;386:1143-54.