Éditorial

L'hématologie francophone


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Nous sommes extrêmement fiers de pouvoir vous présenter ce dossier consacré à l'hématologie francophone. Correspondances en Onco-Hématologie est l'une des rares revues d'hématologie de langue française ; elle est présente sur les 5 continents, et la majorité des personnes parlant notre langue ­n'habite pas en France.

À l'heure de la mondialisation, où l'information circule instantanément à travers la planète, l'étudiant en médecine de République démocratique du Congo, en lisant les comptes rendus de la Société américaine d'hématologie de 2018, sait qu'un patient européen ou d'Amérique du Nord porteur d'un lymphome réfractaire a une chance d'être sauvé grâce aux CAR T-cells pour 400 000 euros. Il sait surtout que le patient africain porteur de la même pathologie n'aura pas forcément accès en première ligne à un diagnostic fiable de lymphome et probablement peu ou pas aux médicaments adaptés. Mais il sait aussi qu'il est possible, dans son pays, de réaliser une étude prospective portant sur plus de 600 enfants atteints de drépanocytose qui montre que l'hydroxyurée améliore leur qualité de vie, diminue les besoins transfusionnels, la fréquence du paludisme et même le nombre de décès, et ce pour un coût de quelques euros par mois. En 2050, 25 % de la population mondiale (9,8 milliards de personnes) sera sur le continent africain…

Pour ce premier numéro de l'année, nous avons demandé à chacun de nos correspondants francophones un texte de présentation de l'héma­tologie dans son pays, sa province ou sa “grande région”, ainsi qu'un court article sur une particularité de prise en charge d'une hémo­pathie. Merci à tous d'avoir joué le jeu ! Les thématiques abordées évoquent bien évidemment les énormes difficultés de la prise en charge des hémopathies malignes quand les ressources diagnostiques et thérapeutiques font cruellement défaut, mais elles donnent également des raisons d'espérer en voyant les progrès réalisés, par exemple dans la prise en charge de la leucémie myéloïde chronique en Afrique subsaharienne et en Haïti, ou des leucémies aiguës au Maghreb. Il en est de même du programme de développement des greffes allogéniques qui a pu se mettre en place au Liban ces 20 dernières années ou des résultats encourageants des greffes autologues au Viêtnam. La place de plus en plus importante de la prise en charge des hémoglobinopathies dans les pays occidentaux − comme en témoigne l'article de nos collègues québécois − laisse penser que des collaborations peuvent se mettre en place.

Ce premier numéro consacré à l'hématologie francophone en appelle d'autres. Les thématiques à aborder sont multiples : particularités des prises en charge médicales selon les pays, accès aux examens biologiques et d'imagerie ainsi qu'aux médicaments, fixation du prix des médicaments, représentation de la maladie selon les cultures, recherche clinique dans les pays en développement, rôle des industries pharmaceutiques dans l'accessibilité des médicaments, spécificités de certaines hémopathies selon le pays, types de partenariats possibles, etc.

Puisse-t-il aussi et surtout susciter des travaux communs, des collaborations, des échanges d'étudiants, de médecins, de soignants afin que chacun soit à même de partager les expériences et les pratiques pour améliorer la prise en charge des malades où qu'ils soient.

Merci à tous nos collègues d'Afrique subsaharienne, du Liban, de Belgique, du Québec, du Viêtnam, d'Haïti, du Maghreb d'avoir construit ce numéro. D'autres collègues, prévenus tardivement, n'ont pas eu le temps d'y participer, et je pense tout particulièrement à nos amis rwandais. Ce n'est que partie remise…

Merci (comme toujours !) à Marie-Christine Béné pour un Juliette remarquable et adapté au sujet de ce dossier et pour son aide à la relecture attentive des manuscrits.

Bonne lecture à toutes et à tous.


Liens d'intérêt

P. Feugier déclare ne pas avoir de liens d’intérêts.