Editorial

Hormones, antihormones et cancer du sein ou “Je t'aime … Moi non plus” !


(pdf / 123,10 Ko)

Les hormones stéroïdes et le cancer du sein sont étroitement liés par des relations multiples et complexes. Le cancer du sein est le paradigme d'une pathologie hormonodépendante. Ainsi,  plus de 80 % des cancers du sein comportent des récepteurs hormonaux des estrogènes, ce qui a des conséquences majeures pour les décisions thérapeutiques.

Les sujets de réflexion autour des inter-relations entre cancer du sein et hormones sont si foisonnants que 2 numéros de La Lettre du Sénologue y sont consacrés, celui-ci et le suivant, en décembre.

Dans la première partie

  • Paul Cottu et Anika Bensen détaillent le rôle essentiel de l'estradiol dans le processus de la carcinogenèse mammaire. Cet impact spécifique des estrogènes justifie pleinement les thérapeutiques visant soit à en supprimer la production comme les agonistes de la LH-RH ou les inhibiteurs de l'aromatase, soit à en bloquer l'action au niveau de son récepteur comme les SERM (Selective Estrogen Receptor Modulators) ou les SERD (Selective Estrogen Receptor Downregulators).
  • Anne Lesur et Mariam Soussoko analysent chronologiquement la littérature scientifique concernant l'impact de l'association d'un ­analogue de la LH-RH en cas de chimiothérapie. Bien que son efficacité sur la préservation de la fertilité reste encore discutée, une consultation dédiée spécifiquement à ce problème se justifie toujours chez les femmes jeunes.
  • Comme le précisent Christine Rousset-Jablonski et Gaëlle Duliège, l'hormonothérapie représente une arme complémentaire majeure en cas de cancer exprimant des récepteurs hormonaux. Le choix de la molécule repose essentiellement sur le statut hormonal de la patiente. Le délicat problème du switch en cas de changement de statut hormonal survenant en cours d'hormonothérapie est largement discuté tout comme l'intérêt, chez certaines patientes, de l'adjonction d'un analogue de la LH-RH.
  • Une des principales difficultés rencontrées avec cette hormonothérapie est la survenue d'effets indésirables qui en limitent parfois l'utilisation. On conçoit bien, dès lors, l'importance d'améliorer
    la tolérance de ces traitements pour en favoriser l'observance sur le long terme. Serge Perrot propose des pistes pour une meilleure prise en charge des douleurs ostéoarticulaires, principale source d'arrêts ­intempestifs des inhibiteurs de l'aromatase.
  • Thomas Bachelot et Olivia Le Saux précisent la place de l'hormono­thérapie des formes métastatiques en première et en deuxième ligne. La commercialisation prochaine des anti-CDK 4/6 est très prometteuse dans ces situations particulières.

Dans une deuxième partie

  • La durée optimale de l'hormonothérapie adjuvante sera analysée par Marc Espié. Le rapport bénéfice/risque de prolongation au-delà des 5 années de référence est souvent positif, le problème majeur restant celui de l'observance. Il est probable que l'étude plus fine du portrait génomique tumoral pourrait permettre d'adapter de façon individuelle la durée de ces traitements adjuvants.
  • Geneviève Plu-Bureau, Gaëlle Amand et leur équipe analysent le risque vasculaire artériel et veineux des antiestrogènes. Si le recueil des facteurs de risque vasculaire est nécessaire avant prescription de ces thérapeutiques, l'impact vasculaire guide rarement le choix ­thérapeutique, une surveillance spécifique restant néanmoins nécessaire.
  • Enfin, Paul Cottu et Anika Bensen évaluent le rôle de l'hormono­thérapie en prévention primaire. En France, cette pratique reste cependant non recommandée en raison d'un rapport bénéfice/risque défavorable dans cette situation. À l'heure actuelle, seules les habituelles mesures d'hygiène de vie et le dépistage radiologique peuvent être conseillés.

Un très sincère et chaleureux merci à tous les auteurs, leur enthousiasme confirme, si cela était nécessaire, l'intérêt majeur et croissant qui règne autour de la thématique “Hormones, antihormones et cancer du sein” !

Excellente lecture à tous !