Éditorial

Permettons à l'ensemble de la population de bénéficier de la pratique avancée


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Si la France a fait le choix d'un modèle unique de pratique avancée, sans faire la distinction entre les rôles d'infirmier praticien (IP) et d'infirmier clinicien spécialisé (ICS), habituellement décrits dans la littérature internationale et par le Conseil international des infirmières, il semble cependant inexact d'évoquer une mixité du modèle.

En effet, le cadre législatif et réglementaire français correspond en tout point aux caractéristiques de l'ICS et adopte finalement assez peu les spécificités de celles inhérentes à la fonction de l'IP : les mentions correspondent à des pathologies ou des spécialités médicales, et les interventions de l'IPA ne sont possibles qu'après l'établissement d'un diagnostic médical, sans possibilité de faire elle-même une primo­prescription.

La pratique avancée vise à renforcer l'accompagnement personnalisé et le suivi des patients dont la prise en soins est complexe ou chronophage. Nous pouvons évoquer, par exemple, les personnes en situation de précarité financière et sociale, ou celles présentant une multimorbidité ou encore des troubles cognitifs.

Ainsi, nous pouvons regretter le choix, peu ambitieux, de ne positionner la pratique avancée que sur le suivi des 8 pathologies chroniques citées dans le décret. De ce fait, certains patients se trouvent exclus du dispositif, tels ceux atteints d'une cirrhose hépatique, ou d'une maladie infectieuse chronique, ou d'une maladie rare.

La pratique avancée infirmière pourrait se développer en adoptant une approche populationnelle, axée sur les caractéristiques d'un groupe d'individus ou d'une population, et non pas seulement sur la pathologie. Pour cela, le champ réglementaire doit être modifié pour être plus inclusif, en déterminant les caractéristiques populationnelles du domaine (ex : soins primaires, enfants, adultes, personnes âgées, santé mentale).

De plus, autoriser la primoprescription permettrait d'améliorer l'accès aux soins tout en investissant le champ de la prévention et de la promotion de la santé, en amont de la pathologie, moment décisif pour agir sur les déterminants en santé. Cette mise en œuvre de la pratique avancée répondrait ainsi aux enjeux définis dans la stratégie nationale de santé 2018-2022.



Liens d'intérêt

J. Devictor déclare avoir des liens d’intérêts en relation avec cet éditorial (présidente du CNP IPA).