Éditorial

Francophonie et endoscopie


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Le terme “francophonie” est apparu vers la fin du XIXe siècle sous la plume du géographe français Onésime Reclus (1837‑1916) pour décrire l'ensemble des pays et des personnes parlant et écrivant le français. Cependant, la francophonie est à l'évidence plus complexe à définir et regroupe de très nombreux paramètres. Ainsi, selon le premier président de la République du Sénégal et membre de l'Académie française, Léopold Sédar Senghor (1906‑2001) : “La Francophonie, c'est cet Humanisme intégral, qui se tisse autour de la terre, cette symbiose des ‘énergies dormantes' de tous les continents, de toutes les races, qui se réveillent à leur chaleur complémentaire.” Cette chaleur complémentaire, nous la retrouvons en médecine et, plus particulièrement, en hépatogastroentérologie, cette spécialité si vaste. L'endoscopie digestive, me semble-t-il, constitue le ciment de celle-ci. Il est ainsi naturel de travailler ensemble, entre pays francophones, pour soutenir le développement de l'endoscopie digestive.

La Société française d'endoscopie digestive (SFED) a mis en place il y a 1 an une commission de la francophonie qui a pour objectif de favoriser les échanges entre les pays francophones. Plusieurs actions ont été menées, comme la mise en place d'une bourse annuelle permettant d'accueillir dix endoscopistes francophones en leur offrant un stage dans un service d'endoscopie en France, un symposium focalisé sur les obstacles à franchir pour développer l'endoscopie en Afrique, la mise en place d'un webinaire annuel ou encore le soutien apporté aux centres de formation en Afrique – comme celui dirigé par le Pr Naïma Amrani à Rabat au Maroc – et au Moyen-Orient.

Les principaux défis à relever concernant l'endoscopie dans les pays à ressources limitées sont : la formation initiale et continue ; l'accès aux équipements et la disponibilité ainsi que le coût du matériel d'endothérapie. La “survie” d'un équipement en Afrique subsaharienne est très limitée, car sans service de maintenance, il est difficile d'en garantir le bon fonctionnement sur la durée, et mon confrère sénégalais le Pr Pape Saliou Mbaye nous rappelle que “l'Afrique est le cimetière des équipements”.

C'est dans ce contexte qu'un programme de soutien au développement de l'endoscopie digestive à Dakar au Sénégal, appelé SENENDO, a vu le jour sous l'égide de l'ONG internationale la Chaîne de l'Espoir (photos 1 et 2). Les objectifs sont de réaliser des procédures endoscopiques durant les missions grâce à la mise en place d'un plateau technique d'endoscopie de haut niveau, de former des endoscopistes et des aides‑endoscopistes au Sénégal, mais aussi dans toute l'Afrique de l'Ouest, lors d'ateliers de simulation organisés à la faculté de médecine de Dakar. Ainsi, dans le cadre de ce programme, un endoscopiste universitaire sénégalais sera accueilli et formé à l'endoscopie biliopancréatique à l'hôpital européen Georges-Pompidou. Il faut savoir que personne ne réalise de cholangiopancréatographie rétrograde endoscopique ni d'échoendoscopie au Sénégal (17 millions d'habitants) ou en Côte d'Ivoire (29 millions d'habitants) par exemple.

Dans ce numéro consacré à l'endoscopie dans le monde de la francophonie, nous verrons comment la coopération Nord-Nord est très active dans le domaine de l'endoscopie bariatrique et métabolique, avec l'expertise de l'équipe du Pr Vincent Huberty à Bruxelles, mais également en partageant les méthodes d'enseignement d'endoscopie digestive du Pr Charles Ménard à Sherbrooke (Canada) et l'expérience roumaine du Pr Mihai Ciocîrlan.

Enfin, il existe des particularités au sujet de l'endoscopie en Afrique, notamment sur la prise en charge endoscopique des complications de l'hypertension portale dans les hépatopathies chroniques au Maroc faisant l'objet d'un article rédigé par le Pr Dafr-Allah Benajah. Les principales indications endoscopiques en Afrique subsaharienne sont détaillées par le Dr Ibrahima Diallo. La coopération Sud-Sud doit être développée et représente une opportunité importante pour implanter l'endoscopie digestive dans le futur.

Nous remercions chaleureusement nos auteurs francophones pour leur grande motivation à participer à ce numéro et pour avoir partagé leur passionnante expérience en endoscopie.

“Égalité, complémentarité, solidarité”, telle est la devise de la francophonie selon l'Organisation internationale de la francophonie et qui s'applique parfaitement à l'endoscopie digestive.

FIGURES

Francophonie et endoscopie - Figure 1
Francophonie et endoscopie - Figure 2

Liens d'intérêt

G. Rahmi déclare avoir des liens d’intérêts avec Fujifilm, Medtronic, Boston Scientific.