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Congrès/Réunion

14th Annual ARSEP MRI Workshop - Que peut apporter l'IRM à 7 teslas dans la SEP ? - Paris, 1er février 2019


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  • Ce symposium, organisé sous l'égide de l'ARSEP, a regroupé des spécialistes internationaux d'imagerie qui ont fait le point sur l'utilisation des IRM à ultra haut champ (UHF) [≥ 7 teslas] pour les applications liées à la caractérisation des patients atteints de SEP.
  • Bien que les premiers prototypes d'IRM 7T aient été installés depuis plus de 15 ans sur des sites de recherche, le nombre d'installations a augmenté de manière significative durant les 3 dernières années. Cette tendance s'accélère de manière exponentielle avec l'obtention en 2018 de ­l'accréditation de la FDA et le marquage CE des imageurs 7T cliniques pour les applications cérébrales, ostéoarticulaires et musculosquelettiques. À ce jour (février 2019), 75 IRM 7T sont installées dans le monde, dont 2 en France (Saclay et Marseille). Plusieurs projets nationaux sont en cours de finalisation.
  • Intervenant(e)s : Virginie Callot (CRMBM, Marseille, France), Céline Louapre (ICM, Paris, France), Gabriel Mangeat (Polytechnique, Montréal, Canada), Olivier Mougin (Nottingham, Royaume-Uni), Pascal Sati (NIH, Bethesda, États-Unis), Alexandre Vignaud (Neurospin, Saclay, France), Wafaa Zaaraoui (CRMBM, Marseille, France).

Pourquoi une exploration par IRM 7T dans la SEP ?

L'intérêt majeur de l'IRM 7T est de permettre d'augmenter le rapport signal/bruit (qui évolue en fonction de l'intensité du champ magnétique selon B01,65) [1] et certains contrastes comme le T2* (susceptibilité magnétique). Ce gain en rapport signal/bruit permet une amélioration des images, dans leur résolution spatiale, leur contraste, ou encore dans la réduction du temps d'acquisition nécessaire à l'obtention des images.

L'IRM 7T contribue ainsi à un meilleur diagnostic de la SEP par la détection du “signe de la veine centrale” au sein des lésions de la substance blanche (2). En effet, l'imagerie de susceptibilité magnétique (SWI) à haute résolution permet d'observer dans 90 % des cas des lésions de SEP, la présence d'une veine, phénotype spécifique de la SEP (3). Elle permet également d'observer la composante inflammatoire leptoméningiale grâce aux séquences 3D-FLAIR réalisées après injection de gadolinium (4, 5).

L'apport majeur de l'IRM 7T dans la SEP semble résider dans la caractérisation de la pathologie corticale, un axe de recherche très actif, car l'atteinte de la sub­­stance grise est plus fortement corrélée à la progression du déficit clinique irréversible (6). Il existe plusieurs types de lésions corticales possédant des caractéristiques différentes selon leur distribution spatiale, leurs degrés de démyélinisation et d'inflammation (7, 8). L'IRM 7T, par le gain en résolution spatiale et en contraste T2*, permet de mieux détecter et surtout de mieux différencier les lésions leucocorticales, intracorticales ou sous-piales. Il est également possible de déterminer les couches corticales les plus affectées (9). Cette pathologie corticale s'étend au voisinage des lésions visibles chez les patients rémittents et de manière plus diffuse chez les patients secondairement progressifs (10). Ces atteintes corticales peuvent maintenant être mise en correspondance avec le degré de démyélinisation des faisceaux de substance blanche appartenant au même réseau (11). De plus, il semble que la progression de cette composante corticale soit corrélée à la progression des troubles cognitifs et à celle des déficits cliniques (12). Cela ouvre de nouvelles perspectives sur le suivi de la physiopathologie de la maladie avec l'accès à un biomarqueur d'imagerie sensible pour évaluer l'effet potentiel de nouvelles thérapeutiques sur la pathologie corticale dans la SEP. L'utilisation de paramètres plus quantitatifs comme la ­“relaxométrie T1” (séquence MP2RAGE) [13], ­l'imagerie quantitative de susceptibilité magnétique (QSM) [14] ou le transfert d'aimantation (15) permettent d'augmenter la sensibilité et la spécificité des mesures effectuées sur ces régions du cerveau.

Bien que techniquement délicat, ce gain en résolution peut également être appliqué à la caractérisation des atteintes de la moelle épinière. Il est ainsi possible de mieux appréhender l'atrophie de la moelle cervicale, mais surtout d'étudier les atteintes différentielles de la substance blanche et de la substance grise spinale par des méthodes conventionnelles, de relaxo­métrie quantitative (cartographie T1) [16] ou d'IRM de diffusion (17). La combinaison de plusieurs contrastes permet d'obtenir des biomarqueurs pour différencier les faisceaux de substance blanche mais également les régions de la substance grise en fonction de leur cytoarchitectonie.

Enfin, alors que l'IRM traditionnelle étudie les propriétés magnétiques des noyaux d'hydrogène de l'eau, l'IRM 7T permet d'aborder également la maladie sous l'aspect de “l'homéostasie ionique” en étudiant les propriétés magnétiques des noyaux de sodium 23 (23Na) présents dans les différents compartiments tissulaires par le biais de différentes méthodes telles que le Triple Quantum Filtering (TQF) [18] ou les séquences multiéchos (19). Le gain en sensibilité apporté par le 7T permet ainsi de réaliser des cartographies des pools de sodium de mobilité restreinte et de forte mobilité, signaux qui sont préférentiellement sensibles aux pools de sodium intracellulaires et extracellulaires, respectivement. Ainsi, des augmentations de concentrations de sodium du pool intracellulaire ont pu être mises en évidence chez des patients atteints d'une SEP récurrente-rémittente (18).

Limites de l'utilisation d'une IRM 7T

Outre le prix de ces imageurs, la première limitation des IRM 7T est liée aux contre-indications plus drastiques (non-compatibilité de matériel d'orthodontie et autres implants non testés à 7T) devant être appliquées par rapport aux imageurs 3T, ce qui réduit la potentielle généralisation de ces examens à toute la population de malades.

La deuxième limitation est liée aux hétérogénéités du champ magnétique principal B0 qui paraissent plus difficiles à corriger (shim) à très haut champ magnétique. Elles induisent des artéfacts de susceptibilité magnétique se traduisant par une perte importante du signal dans plusieurs régions cérébrales comme le lobe temporal ou le cortex orbitofrontal. De nouvelles procédures d'homogénéisation sont aujourd'hui proposées, intégrant des shims d'ordres supérieurs ou des méthodes de shims dynamiques permettant d'homogénéiser le champ magnétique principal au niveau de la coupe souhaitée.

Le troisième problème important est lié à l'hétéro­généité de l'excitation radiofréquence (dit “champ B1”) et aux limites de dépôt d'énergie (Specific Absorption Rate [SAR]). L'adaptation des séquences pour limiter l'énergie déposée (échos de gradient plutôt qu'échos de spin), la cartographie des hétérogénéités de B1 pour réaliser des corrections a posteriori (20), l'utilisation de “pads” diélectriques (21), les approches d'imagerie par transmission parallèle sans nécessité de modélisation électromagnétique individuelle (impulsions universelles) [22] apportent jour après jour des solutions concrètes à ce problème.

Conclusion

Les applications cliniques de l'IRM 7T sont en pleine expansion et devraient dans un futur proche fournir des marqueurs importants pour l'adaptation des stratégies de traitement, notamment pour les formes montrant une progression de la pathologie corticale. La récente adoption par la FDA d'IRM 7T à vocation clinique ouvre la voie à un nouveau saut technologique dans la manière d'explorer le système nerveux central d'un patient souffrant de SEP. Le symposium IRM ARSEP du 1er février 2019, qui a eu lieu à l'hôpital de La Pitié-Salpétrière, a permis de mettre en évidence toute la potentialité de ces avancées technologiques ouvrant la voie à des changements de paradigmes dans la prise en charge des patients souffrant de SEP dans la décennie à venir.■

Références

1. Pohmann R et al. Signal-to-noise ratio and MR tissue parameters in human brain imaging at 3, 7, and 9.4 tesla using current receive coil arrays. Magn Reson Med 2016;75(2):801-9.

2. Sati P. Diagnosis of multiple sclerosis through the lens of ultra-high-field MRI. J Magn Reson 2018;291:101-9.

3. Sati P et al. The central vein sign and its clinical evaluation for the diagnosis of multiple sclerosis: a consensus statement from the North American Imaging in Multiple Sclerosis Cooperative. Nat Rev Neurol 2016;12(12):714-22.

4. Harrison DM et al. Leptomeningeal enhancement at 7T in multiple sclerosis: frequency, morphology, and relationship to cortical volume. J Neuroimaging 2017;27(5):461-8.

5. Jonas SN et al. Longitudinal persistence of meningeal enhancement on postcontrast 7T 3D-FLAIR MRI in multiple sclerosis. AJNR Am J Neuroradiol 2018;39(10):1799-805.

6. Rocca MA et al. Long-term disability progression in primary progressive multiple sclerosis: a 15-year study. Brain 2017;140(11):2814-9.

7. Haider L et al. The topograpy of demyelination and neurodegeneration in the multiple sclerosis brain. Brain 2016;139:807-15.

8. Bevan RJ et al. Meningeal inflammation and cortical demyelination in acute multiple sclerosis. Ann Neurol 2018;84(6):829-42.

9. Mainero C et al. A gradient in cortical pathology in multiple sclerosis by in vivo quantitative 7 T imaging. Brain 2015;138:932-45.

10. Louapre C et al. Is the relationship between cortical and white matter pathologic changes in multiple sclerosis spatially specific? A multimodal 7-T and 3-T MR imaging study with surface and tract-based analysis. Radiology 2016;278(2):524-35.

11. Mangeat G et al. Changes in structural network are associated with cortical demyelination in early multiple sclerosis. Hum Brain Mapp 2018;39(5):2133-46.

12. Louapre C et al. The association between intra- and juxta-cortical pathology and cognitive impairment in multiple sclerosis by quantitative T2* mapping at 7 T MRI. NeuroImage Clin 2016;12:879-86.

13. Beck ES et al. Improved visualization of cortical lesions in multiple sclerosis using 7T MP2RAGE. AJNR Am J Neuroradiol 2018;doi:10.3174/ajnr.A5534 (Epub ahead of print).

14. Chawla S et al. Longitudinal study of multiple sclerosis lesions using ultra-high field (7T) multiparametric MR imaging. PLoS One 2018;13(9):e0202918.

15. Al-Radaideh A et al. Histogram analysis of quantitative T1 and MT maps from ultrahigh field MRI in clinically isolated syndrome and relapsing-remitting multiple sclerosis. NMR Biomed 2015;28(11):1374-82.

16. Massire A et al. High-resolution multi-parametric quantitative magnetic resonance imaging of the human cervical spinal cord at 7T. Neuroimage 2016;143:58-69.

17. Massire A et al. Feasibility of single-shot multi-level multi-angle diffusion tensor imaging of the human cervical spinal cord at 7T. Magn Reson Med 2018;80(3):947-57.

18. Petracca M et al. Brain intra- and extracellular sodium concentration in multiple sclerosis: a 7T MRI study. Brain 2016;139:795-806.

19. Ridley B et al. Distribution of brain sodium long and short relaxation times and concentrations: a multi-echo ultra-high field 23Na MRI study. Sci Rep 2018;8(1):4357.

20. Haast RAM et al. The impact of B1+ correction on MP2RAGE cortical T1 and apparent cortical thickness at 7T. Hum Brain Mapp 2018;39(6):2412-25.

21. Vaidya MV et al. Improved detection of fMRI activation in the cerebellum at 7T with dielectric pads extending the imaging region of a commercial head coil. J Magn Reson Imaging 2018;48(2):431-40.

22. Gras V et al. Design of universal parallel-transmit refocusing kT-point pulses and application to 3D T2-weighted imaging at 7T. Magn Reson Med 2018;80(1):53-65.


Liens d'intérêt

J.P. Ranjeva déclare ne pas avoir de liens d’intérêts.

C. Barillot n’a pas précisé ses éventuels liens d’intérêts.