Rédactionnel

Défis d’actualité dans la migraine
1. Optimiser le diagnostic


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La migraine constitue la 2e maladie neurologique la plus fréquente après les céphalées de tension, avec, en France, une prévalence chez l’adulte d’environ 14 à 20% selon les études [1] . Elle représente en outre la 2e cause d’années de vie vécues avec un handicap après la lombalgie, devant d’autres maladies neurologiques comme l’épilepsie ou la maladie d’Alzheimer, et même la 1re cause chez les personnes de moins de 50 ans [1,2]. Dans ce contexte, la migraine justife d’être bien connue afin d’en poser le diagnostic avec précision et d’en optimiser la prise en charge [3].


Migraine : une maladie encore sous-identifiée [4]

En France, on estime que 30 à 45 % des migraineux ignorent leur statut de migraineux, dont certains après avoir consulté [5, 6]. D’autres données indiquent une errance diagnostique importante, de plusieurs années en moyenne, ainsi qu’un nombre significatif d’erreurs dia­gnostiques par défaut, pouvant concerner environ un tiers des patients qui consultent [4, 7-9]. Plusieurs raisons peuvent expliquer le sous-­diagnostic de la maladie, parmi lesquelles une sous-utilisation des ­critères diagnostiques existants [9, 10].

Migraine : un diagnostic nécessitant l’application des critères de la 3e édition de l’International Classification of Headache Diseases (ICHD) actualisée en 2018 [1]

Le diagnostic de migraine repose sur la validation par une anamnèse clinique soigneuse des critères ICHD-3 de 2018*, définissant 3 types principaux de migraine – la migraine sans aura, la migraine avec aura et la migraine chronique (figure, voir sur le PDF) –, la normalité de l’examen clinique en dehors des crises et l’exclusion des autres causes possibles de céphalées [1, 4].

Points importants [1, 4, 11, 12] :

  • l’utilisation des critères ICHD-3 fait l’objet d’une recommandation forte pour distinguer la migraine des céphalées de tension, de l’algie vasculaire de la face et de la névralgie du trijumeau ;
  • afin de renforcer la sensibilité diagnostique de l’aura migraineuse, la présence de symptômes positifs tels que les scintillements visuels et/ou les paresthésies a été rajoutée dans les critères de migraine avec aura, et les critères de déroulement de l’aura ont été renforcés ;
  • les critères ICHD-3 de migraine avec ou sans aura privilégiant la spécificité sur la sensibilité, le diagnostic de migraine probable doit être porté en présence de crises migraineuses remplissant l’ensemble des critères diagnostiques, à l’exception d’un seul ;
  • la migraine chronique est désormais considérée comme une entité à part entière et non plus comme une ­complication de la migraine épisodique.

Migraine : une première consultation primordiale pour le parcours de soins des patients

Dans l’étude FRAMIG 3, 40 % des patients avaient cessé de consulter pour leurs migraines et un tiers l’avait fait après la 1re consultation. C’est dire l’importance de cette consultation, qui, si elle ne correspond pas aux attentes du patient, peut déboucher sur une sortie prématurée du circuit de soins [13]. La vigilance est d’autant plus importante que, en pratique neurologique quotidienne, les céphalées constituent le 2e motif le plus fréquent de recours aux soins et la migraine, le 2e diagnostic porté en ambulatoire [14].

* Les critères diagnostiques de la classification internationale des céphalées traduits en français sont disponibles sur le site de la Société française d’étude des migraines et céphalées (SFEMC)–https://sfemc.fr/wp-content/uploads/2022/05/ichd-3-1.pdf– et sur celui de l’International Headache Society(IHS)– https://ihs-headache.org/wpcontent/uploads/2020/05/3628_ichd-3-french.pdf

Références

1. Demarquay G et al. Revised guidelines of the French Headache ­Society for the diagnosis and management of migraine in adults. Part 1: diagnosis and assessment. Rev Neurol (Paris) 2021;177(7):725-33.

2. Vo P et al. Patients’ perspective on the burden of migraine in Europe: a cross-sectional analysis of survey data in France, Germany, Italy, Spain, and the United Kingdom. J Headache Pain 2018;19(1):82.

3. Roos C. Migraine epidemiological, clinical and therapeutic data. Biol Aujourd’hui 2019;213(1-2):35-41.

4. Eigenbrodt AK et al. Diagnosis and management of migraine in ten steps. Nat Rev Neurol 2021;17(8):501-14.

5. ANAES. Recommandations pour la pratique clinique. Prise en charge diagnostique et thérapeutique de la migraine chez l’adulte et chez l’enfant : aspects cliniques et économiques. Argumentaire. Tome 1 : Prise en charge diagnostique de la migraine et évaluation du handicap chez l’adulte et chez l’enfant. Octobre 2002 https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/argumentaire_tome1.pdf

6. Lanteri-Minet M et al. Epidemiology of migraine: french key descriptive data. Rev Neurol (Paris) 2016;172(1):56-8.

7. Debremaeker S et al. Le parcours de soins des patients migraineux, ­impact de la maladie et expérience patient : une recherche participative. Rev Epidemiol Sante Publique 2022;70(Suppl 4):S294.

8. Buse DC et al. Barriers to care in episodic and chronic migraine: results from the Chronic Migraine Epidemiology and Outcomes study. ­Headache 2021;61(4):628-41.

9. Ashina M et al. Migraine: epidemiology and systems of care. Lancet 2021;397(10283):1485-95.

10. Martin VT et al. A rational approach to migraine diagnosis and management in primary care. Ann Med 2021;53(1):1979-90.

11. Créac’h C et al. Focus sur les céphalées primaires. La Lettre du Neurologue 2019;23(8):276-81.

12. Donnet A. La migraine chronique : du concept à la prise en charge thérapeutique. Pratique Neurologique – FMC 2018;9:105-10.

13. Géraud G et al. Thérapeutique de la migraine. In: Les céphalées, ­migraines et algies faciales en 30 leçons. Elsevier Masson 2022.

14. Beltramone M et al. The teaching of headache medicine in France: a questionnaire-based study. Headache 2022;62(9):1177-86.


Liens d'intérêt

J. Mawet déclare avoir des liens d’intérêts avec Pfi zer, Lundbeck, Teva, Lilly, AbbVie, GEP Santé, Homeperf et Apotechcare.