Éditorial

La médecine tropicale aux portes des services d'infectiologie français


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Alors que les effets majeurs du réchauffement climatique ne se sont jamais fait autant sentir qu'en cet été 2022 – extrêmes de température dans des régions tempérées, feux ravageurs dans toute l'Europe, mousson cataclysmique en Asie –, quelques injections de rappel de médecine tropicale peuvent être utiles. Il est vrai que malgré l'expansion rapide d'Aedes albopictus, les épidémies d'arboviroses annoncées depuis quelques années en Europe ne sont pas encore là, bien que 5 épisodes de transmission autochtone de dengue aient été rapportés en région PACA et en Occitanie cet été. Néanmoins, ce réchauffement climatique bouleverse progressivement les écosystèmes et les vecteurs, et ce n'est donc pas être alarmiste que de se préparer à voir plus régulièrement en régions tempérées ces maladies que l'on appelait “exotiques”.

Associée à ces phénomènes, et bien que se multiplient de toutes parts les appels à limiter les voyages en avion, la fin supposée de la pandémie de Covid-19 voit exploser plus que jamais les déplacements aériens à travers le monde, parfois vers les contrées les  plus reculées, sources potentielles d'importation de cas inattendus. En effet, on apprend que 7 Français sur 10 sont partis en vacances cet été, et que 35 % des CSP+ (catégories socioprofessionnelles les plus favorisées) seraient partis à l'étranger. Ainsi, la rentrée scolaire sonne le retour de l'étranger pour ces touristes comme pour les VFR (visiting friends and relatives), terme utilisé en médecine des voyages en référence aux étrangers vivant en France et retournant dans leur pays d'origine pour les congés estivaux. Il n'est donc pas impossible que certains d'entre eux rapportent des souvenirs dans leurs bagages...

Pour ce dossier spécial, des équipes de toute la France se sont démenées pour présenter des cas passionnants et originaux issus des voyages de leurs patients – Australie, Chine, Cameroun, Nigeria, Vietnam, Thaïlande, Nouvelle-Calédonie, Malaisie et même les Canaries –, assortis de mises au point actualisées.

Ainsi, le CNR échinococcose de Besançon nous propose deux dossiers : l'un sur l'échinococcose kystique (ex-hydatidose) au retour d'Australie, l'autre sur l'échinococcose alvéolaire au retour de Chine ; l'IRD de Montpellier présente un cas de loase au retour du Cameroun ; l'infectiologie bordelaise, un cas de fièvre de Lassa au retour du Nigeria et un dossier de sarcocystose au retour de Malaisie ; l'équipe de Marseille se penche sur un cas de fasciolose hépatique au retour du Vietnam ; Lillois et Parisiens s'associent pour étudier un cas de gnathostomose au retour de Thaïlande, et la médecine de Nouméa se penche sur un cas de méningite à éosinophiles à Angiostrongylus cantonensis. Les infectiologues de Bicêtre nous proposent une présentation atypique de schistosomiase au retour d'Afrique de l'Ouest et enfin, actualité oblige, ceux de la Pitié-Salpêtrière se penchent sur un cas d'éruption périanale au retour d'un séjour festif aux Canaries, diagnostic final surprenant.

Certains de ces diagnostics seront familiers, comme les échinococcoses, la loase, la schistosomiase ; d'autres, plus surprenants, comme l'angiostrongylose, la gnathostomose, la fasciolose ou la sarcocystose. On parlera également de virus épidémiques venus d'Afrique : tel celui du monkeypox (ou variole du singe), peu connu jusqu'alors, ou encore celui de la fièvre de Lassa, aux sonorités plus familières, mais finalement peu connu.

En bref, un échantillon de la variété et de l'originalité de la médecine tropicale et  de la médecine des voyages, avec des cas tels qu'on peut encore les voir dans les services d'infectiologie français. Alors bonne lecture, une mappemonde à portée de main !


Liens d'intérêt

L. Epelboin déclare ne pas avoir de liens d’intérêts en relation avec cet article.