Éditorial

Peau ou articulations : faut-il choisir pour traiter une spondyloarthrite ?


(pdf / 373,19 Ko)

La spondyloarthrite regroupe différentes entités (spondylarthrite ankylosante, rhumatisme psoriasique, arthrites associées aux entérocolopathies, arthrites réactionnelles, formes juvéniles) et s'individualise sur le plan phénotypique en formes axiales (radiographique et non radiographique) et périphériques (arthrite, enthésite, dactylite), avec la possibilité de manifestations extra‑articulaires (psoriasis, uvéite, entérocolopathie).

Les classes thérapeutiques comprennent les traitements symptomatiques (AINS), les traitements d'action lente conventionnels synthétiques (méthotrexate) et les traitements ciblés (biologiques et synthétiques). Nous assistons depuis quelques années à un élargissement considérable de l'arsenal thérapeutique pour l'ensemble du spectre des spondyloarthrites. Faut-il s'en réjouir (du fait de l'augmentation des possibilités) ou s'en inquiéter (car il est difficile de choisir) ? Devant un tel embarras du choix, il vaut mieux retenir l'intérêt du choix que l'inconvénient de l'embarras. Cela est particulièrement vrai dans le contexte du rhumatisme psoriasique. Différentes classes sont en effet disponibles dans le cadre de traitements ciblés :

  • anti-TNF (anticorps monoclonaux, récepteur soluble) avec biosimilaires pour certains ;
  • anti-IL-17 ;
  • anti-IL-23 (anti-p40 : anti-IL-12/23 ; anti-p19) ;
  • inhibiteur de la phosphodiestérase 4 (PDE4) ;
  • inhibiteurs de JAK.

Les éléments du choix sont fondés sur les données d'efficacité rhumatologique et dermatologique et sur le profil de tolérance de chaque option thérapeutique. Ce premier choix doit ensuite être soumis à la toise des caractéristiques du patient : type d'atteinte rhumatologique prédominante (axiale, périphérique) et état de l'atteinte dermatologique. Pour ce dernier point, il faut prendre en considération l'étendue du psoriasis (le plus souvent de façon globale, car personne ne réalise de PASI en pratique courante), mais aussi sa sévérité de par le retentissement psychosocial ou certaines localisations plus gênantes (visage, organes génitaux). La présence d'une maladie cutanée active peut par ailleurs permettre une majoration des posologies “rhumatologiques” dans le cadre de l'autorisation de mise sur le marché. Il faut également prendre en compte les comorbidités et pathologies associées.

On peut ainsi élaborer un premier algorithme sommaire, considérant les éléments rhumatologiques et cutanés (tableau).

Des étude face-face ont par ailleurs mis en lumière des différences sur le plan dermatologique entre certains agents. Ainsi, les anti-IL-17 développent une efficacité supérieure contre le psoriasis comparativement à l'adalimumab (anticorps anti-TNF) [1, 2], et certains anti-IL-23 paraissent supérieurs aux anti-IL-17 dans ce domaine, en particulier en termes d'efficacité à la 52e semaine [3]. Ainsi, s'il y a un choix, ce dernier est raisonné : il ne faut pas choisir entre peau et rhumatisme, mais tenir compte des deux, ce qui témoigne de l'importance de l'analyse des données du patient, en particulier de la présentation phénotypique rhumatologique et dermatologique, d'une part, et de la légitime collaboration rhumatologue-dermatologue, d'autre part, jetant ainsi les bases d'une médecine personnalisée [4].

Tableau. Effet des traitements ciblés sur les différents sites d’atteinte inflammatoire (X = efficacité ; – = absence d’efficacité).

Rhumatisme axialRhumatisme
périphérique
PsoriasisMaladie inflammatoire chronique de l’intestin
Anticorps anti-TNFXXXX
Récepteur soluble du TNFXXX
Anti-IL-17XXX
Anti-p40 IL-23XXX
Anti-p19 IL-23±XXX
Inhibiteur de PDE4XX
Inhibiteur de JAKXXXX

Références

1. Smolen JS et al. Multicentre, randomised, open-label, parallel-group study evaluating the efficacy and safety of ixekizumab versus adalimumab in patients with psoriatic arthritis naïve to biological disease-modifying antirheumatic drug: final results by week 52. Ann Rheum Dis 2020;79:1310-9.

2. McInnes IB et al. ; EXCEED Study Group. Secukinumab versus adalimumab for treatment of active psoriatic arthritis (EXCEED): a double-blind, parallel-group, randomised, active-controlled, phase 3b trial. Lancet 2020;395:1496-505.

3. Warren RB et al. Efficacy and safety of risankizumab vs. secukinumab in patients with moderate-to-severe plaque psoriasis (IMMerge): results from a phase III, randomized, open-label, efficacy-assessor-blinded clinical trial. Br J Dermatol 2021;184:50-9.

4. Goupille P, Wendling D. Toward a tailored therapeutic prescription for patients with axial spondyloarthritis. Joint Bone Spine 2021;88:105019.


Liens d'intérêt

D. Wendling déclare avoir les liens d’intérêts suivants :

• intérêts financiers : aucun ;

• liens durables ou ­permanents : aucun ;

• interventions ponctuelles : AbbVie, BMS, MSD, Pfizer, Roche, Chugai, Amgen, Nordic Pharma, UCB, Sobi, Sanofi Aventis, Novartis, Janssen, Celgene, Hospira, Lilly, Sandoz, Grünenthal, Galapagos ;

• intérêts indirects : AbbVie, Pfizer, Roche, Chugai, MSD, UCB, Mylan, Fresenius Kabi.

F. Aubin déclare avoir les liens ­d’intérêts suivants :

• intérêts financiers : aucun ;

• liens durables ou permanents : aucun ;

• interventions ponctuelles : AbbVie, BMS, MSD, Pfizer, Amgen, Nordic Pharma, UCB, Sobi, Sanofi Aventis, Novartis, Janssen, Celgene, Lilly.