Pour les patients cirrhotiques atteints d'un petit CHC, la transplantation hépatique (TH) est considérée comme le meilleur traitement, car elle permet de traiter à la fois le CHC et la cirrhose sous-jacente. La résection hépatique (RH) et la radiofréquence (RF) constituent de bonnes options pour des patients ayant une fonction hépatique préservée et d'un petit CHC (1). À ce jour, il n'existe pas d'étude ayant analysé simultanément les 3 traitements curatifs du CHC en intention de traiter (ITT). L'objectif de cette étude était d'analyser la survie globale (SG) en ITT et en per protocole pour chacun de ces traitements et d'identifier les facteurs pronostiques indépendants de survie.
Méthodes
De 2006 à 2013, nous avons recruté prospectivement tous les patients atteints d'un CHC nouvellement diagnostiqué, chez qui un traitement curatif (TH, RF, RH) avait été décidé en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP). Les données cliniques, biologiques et radiologiques relatives à chaque patient étaient recueillies au moment de la présentation en RCP. Le suivi était réalisé jusqu'au décès du patient ou jusqu'au 31 décembre 2014. Le choix du traitement curatif reposait sur les recommandations internationales et sur la localisation de la tumeur (1). Notre RCP utilisait les critères 5/5 pour déterminer les patients éligibles à une TH : jusqu'à 5 tumeurs de 5 cm de grand axe maximum (3). Un traitement d'attente était proposé en fonction des recommandations EASL-EORTC (1) et en cas d'alpha-fœtoprotéine (αFP) supérieure à 100 μg/ml. Une chirurgie était proposée pour les patients de score Child A avec une bilirubinémie normale et sans hypertension portale. Pour les autres, la RF était le traitement de choix.
Résultats
De janvier 2006 à juin 2013, nous avons inclus 387 patients atteints d'un CHC de novo pour qui un traitement curatif avait été planifié en RCP. La TH était proposée dans 136 cas, la RF dans 131 et la RH dans 120. Les caractéristiques des patients sont détaillées dans le tableau I. Le suivi médian était de 27,5 mois.
Les SG en ITT étaient respectivement de 83, 49 et 35 % à 1, 3 et 5 ans (figure 1). Il n'y avait pas de différence significative entre les groupes de traitement (p = 0,77).
En analyse multivariée, les principaux facteurs indépendants de mauvais pronostic étaient le non-respect de la décision prise en RCP (HR = 0,39 ; IC95 : 0,27-0,54 ; p < 0,001), un taux élevé d'αFP (HR = 0,63 ; IC95 : 0,45-0,87 ; p = 0,005), et la présence d'un CHC excédant les critères de Milan (HR = 0,45 ; IC95 : 0,31-0,65 ; p < 0,001). Le délai entre la RCP et le traitement final n'était pas significativement associé avec la SG dans notre analyse (p = 0,99).
Cent trente-deux patients n'ont pas reçu le traitement prévu, principalement en raison de la progression de leur CHC ou de leur décès (n = 58 ; 44 %). Comme le montre la figure 2, parmi ces patients, la majorité a eu un traitement uniquement palliatif (n = 103 ; 78 %) : sorafénib (n = 11 ; 8,5 %), chimio-embolisation intra-artérielle (n = 61 ; 46,5 %), ou soins de support (n = 31 ; 23 %). Seuls 29 patients (22 %) ont reçu un autre type de traitement curatif (3 % RH [n = 4] ; 19 % RF [n = 25]).
La SG per protocole à 5 ans était de 64 % pour la TH, de 34 % pour la RF et de 40 % pour la RH. Elle atteignait 65 % en cas de TH réalisée pour un CHC dans les critères de Milan. Les survies en ITT et en per protocole sont sur le tableau II.
Conclusion
Dans notre étude, les SG en ITT des patients atteints d'un CHC de novo étaient similaires quel que soit le traitement curatif proposé en RCP. Les facteurs indépendants de mauvais pronostic étaient le non-respect de la décision prise en RCP, un taux élevé d'αFP et une tumeur excédant les critères de Milan. Notre étude est la première à analyser les SG en ITT et per protocole pour les 3 traitements curatifs du CHC en utilisant une cohorte issue de la pratique quotidienne.



