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Revue de presse

DoxyPEP : intérêt de la doxycycline en postexposition dans la prévention des IST bactériennes


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Intérêt de 1 dose élevée unique d’amphotéricine B liposomale pour le traitement de l’histoplasmose disséminée ?

L’histoplasmose disséminée (HD) est une cause majeure de décès chez les patients infectés par le VIH, supérieure même à la tuberculose, en particulier en Amérique du Sud.

L’absence d’outil pour un diagnostic rapide est d’ailleurs souvent la cause d’un retard diagnostique et de prise en charge. Jusqu’alors, le traitement recommandé de l’HD est l’Am B liposomale pour 2 semaines, relayée par l’itraconazole. Les difficultés de mise à disposition, les effets indésirables (en particulier lorsqu’elle doit être remplacée par l’Am B désoxycholate), le monitorage nécessaire rendent ce traitement difficile.

Des données récentes ont montré un intérêt pour 1 dose unique élevée d’Am B liposomale dans la prise en charge de la leishmaniose viscérale et de la cryptococcose neuroméningée [1, 2].

Les auteurs rapportent ici les résultats d’un essai ouvert de phase II, multicentrique, randomisé, comparant le dosage d’Am B liposomale : 1 dose unique à 10 mg/kg et 1 dose à 10 mg/ kg suivie par 1 dose de 5 mg/kg, versus le traitement recommandé par l’OMS, à savoir 3 mg/kg/j d’Am B liposomale pendant 14 jours [3]. À la suite de ce traitement d’attaque, tous les patients recevaient de l’itraconazole (400 mg/j pendant 1 an). Le critère principal de jugement était la guérison clinique à J14. Les critères secondaires de jugement comportaient la mortalité à J14 et la toxicité. Sur le plan statistique, au vu d’un taux de succès estimé à 88 %, avec une puissance de 80 % et une marge de non-infériorité de 20 %, 33 patients devaient être inclus par bras.

Au total, 118 patients ont pu être inclus et analysés en intention de traiter. L’ensemble des patients étaient infectés par le VIH avec un niveau d’immunodépression sévère (25/ mm3) et une charge virale élevée (5,5 log). La présentation clinique de la maladie était similaire dans les 3 groupes. La réponse clinique à J14 (CPJ) a pu être observé chez 84 % des patients ayant reçu 1 dose unique, versus 69 % dans le groupe 2 doses et 74 % dans le groupe traitement standard (p = 0,82). La toxicité rénale et hépatique étaient similaires dans les 3 groupes. Par contre, moins d’hypo-K ont été observés dans les groupes 1 ou 2 doses, de même que les hypo-Mg.

Commentaire

Au total, dans cet essai de phase II, 1 seule dose à posologie élevée d’Am B liposomale semble efficace et avec un profil de tolérance acceptable, ouvrant la voie à une étude de phase III qui pourra permettre de valider cette stratégie.

Peut-on optimiser le traitement de la cryptococcose neuroméningée ?

La cryptococcose neuroméningée reste une cause fréquente de méningite dans les zones de haute prévalence du VIH et représente la 2e cause de mortalité du VIH dans le monde.

Malgré un accès plus large aux antirétroviraux, l’Afrique subsaharienne reste malheureusement une région où la prévalence du VIH non traité est importante et le nombre de cryptococcoses y demeure élevé [1, 2].

La toxicité du traitement conventionnel, ses difficultés d’utilisation et la faible efficacité du fluconazole en monothérapie font que dans une étude publiée en 2018, la mortalité par cryptococcose dépassait les 50 % [3, 4].

En 2018, après publication de l’essai ACTA [5], l’OMS recommandait une phase d’induction d’une semaine par amphotéricine B désoxycholate et flucytosine dans les pays à ressources limitées. Mais même cette durée brève est associée à une toxicité et à des ­difficultés de ­monitorage.

L’amphotéricine B (Am B) liposomale est sûrement un bon candidat pour un traitement court à dose élevée du fait de sa meilleure tolérance, de sa longue demi-vie et sa meilleure diffusion. Le concept d’1 dose unique élevée a déjà été évalué dans la leishmaniose. Après plusieurs études pharmacocinétiques et sur des modèles animaux, la dose de 10 mg/kg semble celle qui a l’activité fongicide maximale (pas de bénéfice démontré à dose supérieure), avec une bonne tolérance.

C’est sur les bases de ces données que les auteurs ont réalisé cette étude de phase III randomisée, contrôlée, de non-infériorité en Afrique [6]. Les patients infectés par le VIH, présentant un 1er épisode de cryptococcose neuroméningée, et n’ayant pas reçu au préalable plus de 2 jours de traitement par Am B ou fluconazole pourraient être inclus. Des transaminases > à 5 fois la normale, des leucocytes < 500/mm3 et des plaquettes < 50 000/ mm3 étaient des critères de non inclusion.

Les patients étaient randomisés (1 :1) soit dans le bras expérimental (Am B liposomale 10 mg/ kg dose unique + 14 j de flucytosine (100 mg/kg) et fluconazole 1 200 mg/j), soit dans le bras traitement standard OMS qui comportait Am B désoxycholate 1 mg/ kg + flucytosine 100 mg/kg pendant 7 j, suivis par fluconazole 1 200 mg/j de J8-J14. Le critère principal de jugement était la mortalité toutes causes confondues 10 semaines après la randomisation. Estimant un risque de décès de 35 % à S10, pour démontrer la non-infériorité, 390 patients par groupe devaient être inclus. Entre janvier 2018 et février 2021, 407 patients ont été inclus dans chaque bras et ont pu être analysés. Les 2 groupes étaient parfaitement comparables en termes de caractéristiques vis-à-vis du VIH et des paramètres de la cryptococcose (éléments, pression du LCR). En analyse en intention de traiter (ITT), la mortalité à S10 était de 24,8 % (IC95 : 20,7-29,3) dans le bras expérimental versus 28,7 % (IC95 : 24,4-33,4) dans le bras traitement standard démontrant la non-infériorité (p < 0,001). La clairance fongique était comparable dans les 2 groupes et un bénéfice en termes de toxicité était observé avec moins d’événements de grade 3 et 4 (50 versus 62,3 %) en faveur du groupe Am B liposomale.

Commentaire

Au total, ce schéma avec 1 dose unique de 10 mg/ kg d’Am B liposomale est non inférieur au traitement recommandé par l’OMS.

DoxyPEP : intérêt de la doxycycline en postexposition dans la prévention des IST bactériennes

Ces dernières années ont été marquées par une augmentation significative des IST dans les populations à risque, en particulier la syphilis, la Neisseria gonorrhoeae et la Chlamydia [1]. La doxycycline est efficace vis-à-vis de la syphilis et la Chlamydia, bien tolérée, de faible coût et présente peu d’interactions médicamenteuses. L’idée de l’utiliser en postexposition a déjà été examinée dans certaines études évaluant la PrEP (Ipergay) et était associée à une réduction de risque d’IST de 47 % chez des HSH [2]. Son efficacité semblait excellente pour la syphilis et la Chlamydia mais très faible sur la Neisseria gonorrhoeae. Les auteurs ont réalisé cette étude (DoxyPEP) randomisée menée en ouvert auprès d’HSH et de femmes transgenres qui prenaient une prophylaxie préexposition (PrEP) contre l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH)  (cohorte PrEP) ou qui vivaient avec une infection par le VIH (cohorte de personnes vivant avec une infection par le VIH [PVVIH]) et qui avaient eu une infection à gonocoque, à Chlamydia ou à la syphilis au cours de l’année précédente [3]. Les participants ont été randomisés (2 :1) pour prendre 200 mg de doxycycline dans les 72 h suivant un rapport sexuel sans préservatif (prophylaxie postexposition à la doxycycline) ou recevoir une prise en charge standard sans doxycycline. Les tests de dépistage des IST ont été effectués tous les trimestres. Le critère d’évaluation principal était l’incidence d’au moins 1 IST par trimestre de suivi. Sur 501 participants (327 dans la cohorte PrEP et 174 dans la cohorte PVVIH), 67 % étaient caucasiens, 7 % afro-américains, 11 % asiatiques ou insulaires du Pacifique, et 30 % hispaniques ou latino-américains. Dans la cohorte PrEP, une IST a été diagnostiquée lors de 61 des 570 visites trimestrielles (10,7 %) dans le groupe doxycycline et lors de 82 des 257 visites trimestrielles (31,9 %) dans le groupe prise en charge standard, soit une différence absolue de −21,2 points de pourcentage et un risque relatif de 0,34 (IC95 : 0,24-0,46 ; p < 0,001). Dans la cohorte des PVVIH, une IST a été diagnostiquée lors de 36 des 305 visites trimestrielles (11,8 %) dans le groupe doxycycline et lors de 39 des 128 visites trimestrielles (30,5 %) dans le groupe prise en charge standard, soit une différence absolue de −18,7 points de pourcentage et un risque relatif de 0,38 (IC95 : 0,24- 0,60 ; p < 0,001). L’incidence des 3 IST évaluées était plus faible avec la doxycycline qu’avec la prise en charge standard ; dans la cohorte PrEP, les risques relatifs étaient de 0,45 (IC95 : 0,32-0,65) pour la gonorrhée, de 0,12 (IC95 : 0,05-0,25) pour l’infection à Chlamydia et 0,13 (IC95 : 0,03-0,59) pour la syphilis, et dans la cohorte des PVVIH, les risques relatifs étaient respectivement de 0,43 (IC95 : 0,26-0,71), 0,26 (IC95 : 0,12-0,57) et 0,23 (IC95 : 0,04-1,29). Cinq effets indésirables de grade 3 et aucun effet indésirable grave ont été attribués à la doxycycline. Parmi les participants pour lesquels une culture était disponible, une gonococcie résistante à la tétracycline est apparue chez 5 des 13 participants des groupes doxycycline et chez 2 des 16 participants des groupes de prise en charge standard.

Commentaire

En conclusion, cette étude montre que l’incidence combinée de la gonococcie, de l’infection à Chlamydia et de la syphilis a été réduite de deux tiers avec la prophylaxie postexposition à la doxycycline par rapport à une prise en charge standard, ce qui plaide en faveur de son utilisation chez les HSH ayant contracté récemment une IST bactérienne.

Références

1. Jarvis JN et al. Single-dose liposomal amphotericin B treatment for cryptococcal meningitis. N Engl J Med 2022;386:1109-20.

2. Sundar S et al. Single-dose liposomal amphotericin B for visceral leishmaniasis in India. N Engl J Med 2010;362:504-12.

3. Pasqualotto AC et al. Single high-dose of liposomal amphotericin B in human immunodeficiency virus (HIV)/AIDS-related disseminated histoplasmosis: a randomized trial. Clin Infect Dis 2023;ciad313.

1. Osler M et al. The continuing burden of advanced HIV disease over 10 years of increasing antiretroviral therapy coverage in South Africa. Clin Infect Dis 2018;66:Suppl 2:S118-S125.

2. Tenforde MW et al. Advanced human immunodeficiency virus disease in Botswana following successful antiretroviral therapy rollout: incidence of and temporal trends in cryptococcal meningitis. Clin Infect Dis 2017;65:779-86.

3. Bicanic T et al. Toxicity of amphotericin B desoxycholatebased induction therapy in patients with HIV-associated cryptococcal meningitis. Antimicrob Agents Chemother 2015;59:7224-31.

4. Tenforde MW et al. Mortality from HIV-associated meningitis in sub-saharan Africa: a systematic review and meta-analysis. J Int AIDS Soc 2020;23(1):e25416.

5. Molloy SF et al. Antifungal combinations for treatment of cryptococcal meningitis in Africa. N Engl J Med 2018;378:1004-17.

6. Jarvis JN et al. Single-dose liposomal amphotericin B treatment for cryptococcal meningitis. N Engl J Med 2022;386:1109-20.

1. Centers for Disease Control and Prevention. Sexually transmitted disease surveillance 2020. https://www.cdc.gov/std/statistics/2020/2020-SR-4-10-2023.pdf

2. Molina JM et al. Post-exposure prophylaxis with doxycycline to prevent sexually transmitted infections in men who have sex with men: an open-label randomised substudy of the ANRS IPERGAY trial. Lancet Infect Dis 2018;18:308-17

3. Luetkemeyer AF et al. Postexposure doxycycline to prevent bacterial sexually transmitted infections. N Engl J Med 2023;388(14):1296-306.