Spécificité des cancers chez les patients immunodéprimés
- L'immunodépression, notamment chez les patients transplantés (d'organe ou de cellules souches hématopoïétiques) ou en cas d'infection par le VIH, est associée à une augmentation de l'incidence de nombreux cancers, responsable d'une morbidité et d'une mortalité importantes dans ces populations. L'épidémiologie et la présentation clinique de ces cancers sont différentes de celles de la population générale, avec un rôle important d'agents infectieux (notamment viraux) dans l'oncogenèse, un diagnostic parfois plus tardif, une pathologie plus agressive et un pronostic souvent plus péjoratif. En l'absence de recommandations précises sur le plan thérapeutique, hormis les lymphoproliférations postgreffe, l'attention doit être portée sur les comorbidités et les interactions médicamenteuses potentielles, en particulier via le cytochrome P450, nécessitant le recours à une prise en charge multidisciplinaire avec une réunion de concertation comme celles des groupes CANCERVIH et k-virogref en France. L'objectif de cette revue est de présenter une actualité scientifique concernant l'épidémiologie des cancers associés à l'immunodépression, leurs causes possibles et la spécificité de leur prise en charge.
Liens d'interêts
A. Gobert, M. Veyri et N. Balegroune déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
V. Leblond et J.P. Spano déclarent avoir des liens d’intérêts avec Roche, MSD, Gilead, Novartis, Lilly, PFO et AstraZeneca.
S. Choquet déclare avoir des liens d’intérêts avec Roche, Biogaran, Sandoz et Atara.
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Figure 1. Mécanismes mimétiques de l’EBV lui permettant de maintenir le lymphocyte B hôte en vie.A. Lymphocyte B non infecté, dont la survie dépend d’une activation par le récepteur B (BCR) après contact avec des antigènes ou par une activation du CD40 membranaire par du CD40 ligand circulant. B. Dans le lymphocyte B infecté par l’EBV, LMP2A mime une activation du BCR, et LMP1, une activation de CD40. Dans le noyau, EBNA2 mime les récepteurs Notch1 activés et active les récepteurs RBP-Jκ.

Figure 2. Recommandations de traitement des LPT CD20+. Schéma du protocole LPT1 amendé.Après une baisse de l’immunosuppression et 4 injections hebdomadaires de 375 mg/m2 de rituximab, les patients en rémission complète bénéficient de 4 nouvelles injections séparées chacune de 3 semaines ; dans les autres cas, 4 cures de R-CHOP21 sont effectuées.

Organe greffé | LNH | Cancer bronchopulmonaire |
Cancer hépatique |
Cancer du rein |
---|---|---|---|---|
Cœur | 283 (7,79) | 386 (2,67) | 13,8 (1,02) | 90,1 (2,90) |
Rein | 141 (6,05) | 115 (1,46) | 10,7 (1,08) | 126 (6,66) |
Foie | 217 (7,77) | 178 (1,95) | 495 (44) | 39,9 (1,80) |
Poumon | 532 (18,73) | 626 (6,13) | 17 (2,04) | 34 (1,49) |
RIS : ratio d’incidence standardisé.
Lésions non destructives | Hyperplasie plasmocytaire Mononucléose infectieuse Hyperplasie floride folliculaire |
---|---|
LPT polymorphes | |
LPT B monomorphes | Lymphome B diffus à grandes cellules Lymphome de Burkitt Plasmocytome-like Myélome Lymphome du MALT EBV+ |
LPT T monomorphes | Lymphome T, non spécifié par ailleurs Lymphome T hépatosplénique Lymphome T/NK Autres LNH T/NK |
Lymphome de Hodgkin classique |
Lymphomes communs avec le sujet immunocompétent | Lymphome de Burkitt LBDGC Lymphome de Hodgkin classique Lymphomes de la zone marginale Lymphomes T/NK |
---|---|
Lymphomes plus spécifiques des PVVIH | Lymphome des séreuses Lymphome plasmablastique LBDGC HHV8+ |
Lymphomes communs avec d’autres immunosuppressions | Lymphoprolifération polymorphe |
LBDGC : lymphome B diffus à grandes cellules ; PVVIH : personnes vivant avec le VIH.
Profil du patient | Fréquence | ||
---|---|---|---|
Homme | Femme | ||
Échographie hépatique associée à un dosage de l’α-fœtoprotéine |
Cirrhose, quelle qu’en soit la cause | Tous les 3 à 6 mois | |
Co-infection VHB et ADN VHB > 2 000 UI/ml Co-infection VHB et sujet âgé de plus de 50 ans Co-infection VHB et sujet originaire d’Asie ou d’Afrique subsaharienne quel que soit l’âge Antécédent familial de carcinome hépatocellulaire |
Tous les 6 mois | ||
Examen proctologique (± cytologie anale et anuscopie haute résolution)* |
HSH | Antécédent de conisation Antécédent de lésions du col |
Bilan initial systématique ; périodicité du suivi individualisée |
Rapports anaux Antécédent de condylomes |
|||
Cytologie cervico-utérine : examen annuel durant les 3 premières années de suivi |
Si CD4 > 500/mm3 et CV VIH indétectable et absence d’anomalie sur les 3 cytologies consécutives |
Tous les 3 ans | |
Si antécédent de cytologie anormale (quel qu’en soit le grade) Si antécédent de conisation |
1 fois par an | ||
Colposcopie | Si cytologie anormale gradée LSIL ou HSIL Si HPV+ au niveau du col |
À la demande | |
Si antécédent de conisation Ou si CD4 < 200/mm3 |
1 fois par an | ||
Recherche d’une infection à HPV au niveau du col | Si ASC-US à la cytologie cervicale et CD4 > 500/mm3 et CV VIH indétectable et plusieurs cytologies antérieures consécutives normales | À la demande | |
Examen de la peau et de la muqueuse buccale |
Tout patient | 1 fois par an | |
Recherche de mélanome | Sujet à risque | Tous les 6 mois | |
Palpation des seins et mammographie | Femme âgée de 50 à 74 ans (dès 40 ans en cas d’antécédent familial) |
Tous les 2 ans | |
Recherche de sang dans les selles (test immunologique) | Homme ou femme âgé de 50 à 74 ans | Tous les 2 ans | |
Toucher rectal | Homme âgé de 50 à 75 ans | 1 fois par an | |
Cytologie urinaire** | Homme ou femme Exposition professionnelle pendant 1 an ou plus à des carcinogènes chimiques (aniline, cyclophosphamide) |
Tous les 6 mois à partir de la 20e année suivant la période d’exposition |
* Pour le dépistage des lésions cancéreuses de haut grade. ** Vigilance en cas d’antécédents de radiothérapie pelvienne.
ASC-US : Atypical Squamous Cell of Unknown Significance ; CV : charge virale ; HPV : Human PapillomaVirus ; HSH : hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes ; HSIL : High-grade Squamous Intraepithelial Lesion ; LSIL : Low-grade Squamous Intraepithelial Lesion.
Bilan avant toute immunothérapie Interrogatoire et examen clinique Recherche de : – un antécédent récent d’infection ou de fièvre (à explorer de façon appropriée) – une symptomatologie digestive (nausées, troubles du transit) – une symptomatologie pulmonaire (toux, dyspnée) – une symptomatologie neurologique (céphalées, neuropathie périphérique) – une symptomatologie cutanée (éruption) – une symptomatologie rhumatologique (arthralgie) Évaluation : – du performance status – des constantes (poids, taille, indice de masse corporelle, pouls, tension artérielle, température) Inventaire de l’ensemble des traitements en cours Examens de laboratoire Sanguins : – hémogramme, plaquettes – glycémie – ionogramme et réserve alcaline (calcium, phosphore, acide urique, urée) – créatininémie, clairance de la créatinine – bilirubine totale, ASAT, ALAT, GGT, PAL – albumine – CRP – anticorps antinucléaires, anti-TPO, antithyroglobuline – TSH, T4, cortisol et ACTH mesurés à 8 h, LH, FSH, estradiol, testostérone – charge virale EBV, HHV8 – PCR CMV si sérologie CMV+ – IGRA-tuberculose – sérologies VHB (et ADN VHB si antigène HBs+ ou anticorps HBc isolés) et VHC (ARN VHC si sérologie positive) Urinaires : – protéinurie sur échantillon (urine du matin à jeun combinée à un dosage de la créatininurie) et analyse du sédiment urinaire Imagerie – radiographie du thorax de référence ou scanner thoracique avec coupes sériées fines, clichés avec et sans injection |
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Bilan avant chaque cure d’immunothérapie (à jeun) Sanguin : – hémogramme, plaquettes – albumine – ionogramme (calcium, magnésium, phosphore) – bilirubine totale, ASAT, ALAT, GGT, PAL – glycémie – LDH – CRP – TP – créatininémie, clairance de la créatinine – CD4, CD8, rapport CD4/CD8 – charge virale VIH Urinaire : – protéinurie, glycosurie sur les urines du matin |
Bilan toutes les 3 cures d’immunothérapie – TSH (T3, T4 si TSH anormale) – anticorps antinucléaires – ADN VHB (si antigène HBs+ ou anticorps HBc isolés) – ARN VHC (si sérologie positive) |