Vie professionnelle

Abécédaire des questions-réponses les plus fréquentes sur la vaccination contre la Covid-19


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La pandémie de Covid-19 causée par le SARS-CoV-2 a stimulé le développement de vaccins très efficaces qui ont été produits à une vitesse sans précédent grâce à l'utilisation de nouvelles technologies. Aucune alerte de sécurité majeure, hormis de rares cas d'anaphylaxie, n'avait été signalée lors des premiers essais qui ont concerné des dizaines de milliers d'adultes, et le risque d'effets indésirables graves est resté remarquablement faible après la vaccination de plus de 1 milliard de personnes dans le monde. Il n'est pas surprenant que des rapports de réactions exceptionnelles soient maintenant décrits à mesure que le nombre d'individus vaccinés augmente.

Des enquêtes montrent qu'environ la moitié des Français (dont une partie du personnel de santé : infirmières, aidessoignantes) hésitent encore à se faire vacciner contre la Covid-19. Certes, l'hésitation vaccinale était depuis longtemps largement répandue en France, mais l'absence initiale d'enthousiasme des autorités, les positions de certaines sociétés savantes amplifiées par les réseaux sociaux et les médias n'ont rien amélioré.

Le manque de vaccins en Europe, lié aux retards de développement de certains vaccins, voire à leur arrêt, ou aux difficultés de fabrication de certains autres, auquel s'ajoutent les problèmes logistiques habituels de l'administration française, constitue maintenant la raison essentielle du retard des programmes de vaccination en France. 

Aux maladresses et incidents initiaux autour du vaccin AstraZeneca (cafouillage de la demi-dose plus “efficace” que la dose pleine, réputation initiale d'une moins grande efficacité, fréquence des épisodes fébriles au décours de la vaccination chez les sujets jeunes, modification d'intervalle entre les doses, retards successifs de livraisons), est venu s'ajouter un signal sérieux de pharmacovigilance. En effet, des événements rares mais graves de thromboses veineuses atypiques cérébrales, splanchniques, associées à des thrombopénies et des épisodes de coagulation intravasculaire disséminée (CIVD) ont été rapportés. Ceci n'a fait qu'accentuer l'hésitation vaccinale en Europe en général, et en France en particulier. Pourtant, nous observons l'émergence de nouveaux variants plus contagieux. Outre le variant anglais (B.1.1.7), déjà largement prédominant en France comme dans toute l'Europe et en Israël, circulent aujourd'hui d'autres variants, suspectés d'échapper à l'immunité spécifique, acquise par une infection précédente due à un virus historique ou par la vaccination. Il s'agit des variants sudafricain, brésilien et maintenant indien. Les dernières vagues épidémiques observées dans différents pays (Angleterre, Europe, Israël, Brésil, Inde) sont toujours liées à l'émergence d'un ou de plusieurs variants plus transmissibles associés à un relâchement des mesures d'hygiène, phénomène bien compréhensible du fait de la durée de la pandémie.

Sans programme de vaccination extensif, cette situation sanitaire risque de durer des années. Nous sommes dans une course pour enrayer la diffusion des variants, course que nous ne pourrons gagner que grâce à une vaccination intensive : nous devons vacciner, en fonction de la disponibilité des vaccins, le plus de personnes possible, le plus rapidement possible. Mais la vaccination seule ne suffira pas : il faut prévoir de maintenir les mesures barrière actuelles en prévoyant avec prudence leur levée progressive ; limiter une réplication extensive des virus qui favorise l'émergence des mutants ; utiliser de façon judicieuse les autotests et contrôler rigoureusement les frontières avec les pays où l'épidémie flambe et où des mutants préoccupants circulent. Plusieurs pays ont déjà pu, grâce à la combinaison de ces outils et des campagnes de vaccination à grande échelle, vacciner une grande majorité de la population à risque et obtenir des résultats d'“effectiveness” (efficacité en vie réelle) impressionnants leur permettant une sortie rapide des effets de la pandémie. 


A

A comme “Adénovirus”

Plusieurs vaccins contre la Covid-19 ayant obtenu l'AMM (AstraZeneca, Johnson & Johnson) ou en cours d'évaluation européenne (Sputnik V, CanSino) utilisent des adénovirus (simiens ou humains modifiés) comme vecteurs. S'agit-il de vaccins vivants et ont-ils les mêmes contre-­indications que les vaccins vivants (immuno­dépression, grossesse, etc.) ? Non ! La souche modifiée d'adénovirus de ces vaccins est incapable de se répliquer. Ces vaccins ne peuvent pas être considérés comme des vaccins vivants. Ils induisent une immunité contre le SARS-CoV-2 en pénétrant dans les cellules, où ils délivrent la séquence nécessaire à la production de la protéine S, qui sera exprimée à la surface de la cellule (comme les vaccins à ARNm) sans risque de modification des gènes. Cependant, une immunité contre les autres antigènes de l'adénovirus vecteur est aussi déclenchée, soit par les antigènes présents à la surface des virions injectés, soit par l'expression des gènes de ces protéines dans les cellules comme pour le Spike. Cette immunité pourrait limiter le nombre de virus capables d'entrer dans les cellules lors de la 2e dose et donc diminuer la production de l'antigène du Spike. Ceci pourrait en partie expliquer pourquoi, lorsqu'elle est faite trop tôt (avant 12 semaines), la 2e dose a moins d'efficacité. C'est pour éviter ce type de phénomène – que l'on peut rapprocher de l'effet blunting pour la vaccination contre la coqueluche ou la grippe – que le vaccin Sputnik V comporte un adénovirus différent pour chacune des 2 doses. Un effet indésirable de groupe rare mais grave a été rapporté. Il s'agit de thromboses atypiques (cérébrales, splanchniques, diffuses) avec thrombopénie, de coagulation intravasculaire disséminée, liées très probablement à un mécanisme auto-immun proche de celui des thrombo­pénies à l'héparine. (26/04/21)

A comme “Adjuvant”

Les vaccins contre la Covid-19 contiennent-ils des adjuvants ? Non ! Les vaccins à ARNm et les vaccins vectorisés viraux n'en ont pas besoin pour stimuler l'immunité. Parmi les vaccins en fin de développement et bientôt disponibles, celui de Novavax, vaccin sous-unitaire recombinant à nanoparticules, en contient (Matrix-M). C'est également l'approche développée par Sanofi Pasteur et GSK (AS03).

A comme “Adolescent”

Dispose-t-on de données d'immunogénicité, de tolérance et d'efficacité chez les adolescents ? Oui ! Pfizer-BioNTech a réalisé une étude chez des jeunes adolescents de 12 à 15 ans : cette étude versus placebo, comportant 2 260 adolescents, outre une bonne tolérance, n'a retrouvé aucun cas chez les vaccinés et 18 cas dans le groupe contrôle avec une immunogénicité supérieure à celle des sujets de 16 à 25 ans… Ce résultat n'est pas étonnant ; une meilleure immunogénicité chez l'adolescent est déjà connue pour de nombreux vaccins : hépatite B, papillomavirus, hépatite A, etc. Elle permet des schémas vaccinaux comportant moins de doses chez l'adolescent. Dans un contexte où l'on sait que les adolescents sont aussi souvent contaminés et contaminants que les adultes jeunes, et que les données sur la sécurité de ces vaccins sont de plus en plus nombreuses, leur vaccination permettrait d'envisager plus sereinement la rentrée 2021/2022 dans les collèges et lycées. (06/04/21)

A comme “Aiguille”

Quelle(s) aiguille(s) faut-il utiliser pour la vaccination contre la Covid-19 ? Ces vaccins, bien que quasiment indolores à l'injection, entraînent assez fréquemment des réactions locales. La meilleure façon de les prévenir est de bien injecter en intramusculaire (i.m.). Pour cela, l'injection doit se faire à 90 degrés, sans pincer la peau mais au contraire en la tendant, et le choix de l'aiguille repose sur son diamètre et sur sa longueur. Le diamètre le plus fin est en principe le moins douloureux. La longueur pour une injection en i.m. dans le deltoïde doit au moins être de 25 mm pour un sujet de corpulence moyenne. Toutefois, cette longueur doit être adaptée à chaque individu et il ne faut pas hésiter à utiliser des aiguilles plus longues si nécessaire.

A comme “Allaitement”

Peut-on vacciner une femme qui allaite ? Oui ! Comme les femmes enceintes, les femmes allaitantes, bien que les vaccins anti-Covid ne soient pas des vaccins vivants et les risques théoriques apparaissent comme peu plausibles, elles avaient été exclues des études cliniques initiales et, de ce fait, il n'existait pas de données spécifiques les concernant au moment de la mise sur le marché des vaccins. Depuis, des données ont été publiées chez la femme enceinte et allaitante, démontrant la bonne tolérance, l'immunogénicité et le passage des anticorps dans le sang du cordon et le lait. Des anticorps apparaissent dans le lait de mère dès le 7e jour. Ceci laisse augurer d'un certain degré de protection des nouveau-nés et des petits nourrissons. Le Centre de référence sur les agents tératogènes (CRAT) n'identifie aucun risque particulier, et l'OMS recommande de ne pas interrompre l'allaitement. Une femme allaitante et faisant partie d'un groupe ciblé par la vaccination doit être vaccinée: professionnelles de santé, par exemple, et/ou présentant des facteurs de risque de Covid-19 grave. (26/04/21)

A comme “Allergie”

Les personnes allergiques peuvent-elles se faire vacciner avec ces vaccins contre la Covid-19 et notamment avec ceux à ARNm ? Dans l'immense majorité des cas, oui ! Comme pour tous les vaccins, ceux à ARNm sont contre-indiqués chez les personnes ayant des antécédents d'allergie sévère à l'un des composants du vaccin ou en cas de réaction anaphylactique après la 1re dose. Du fait de quelques réactions allergiques graves largement médiatisées, la HAS recommande d'éviter le vaccin chez les personnes présentant des antécédents d'allergie graves de type anaphylactique, dans l'attente de données complémentaires. En revanche, les réactions allergiques qui ne relèvent pas de l'anaphylaxie ne constituent pas une contre-indication à la vaccination. La Fédération française d'allergologie a précisé que “les antécédents d'allergie ou d'anaphylaxie ne constituent en aucun cas une contre-indication systématique à cette vaccination”. En pratique, l'administration de ces vaccins (comme pour tout autre vaccin) doit être réalisée dans des conditions permettant de gérer une réaction d'hypersensibilité immédiate grave : adrénaline injectable (stylo auto-injecteur ou flacon + seringue) à disposition et observation des personnes vaccinées pendant au moins 15 minutes pour tous les patients et 30 minutes pour les patients à risque.

A comme “Anaphylaxie”

Les vaccins à ARNm semblent provoquer des réactions anaphylactiques (ou anaphylactoïdes) plus fréquentes que les autres vaccins. En connaît-on les raisons ? Dans la littérature, l'incidence des réactions anaphylactiques au décours d'une vaccination est estimée de 1/500000 à 1/1000000. Aux États-Unis, pour les vaccins Pfizer-BioNTech (Comirnaty®) et Moderna, l'incidence estimée par les CDC est de 1/200000 à 1/400000 doses. Comme il n'est pas envisageable que ces réactions immédiates soient dues directement aux ARNm, d'autres composants du vaccin sont suspectés, sans preuve pour l'instant. En effet, dans ces vaccins, l'ARNm très fragile est protégé dans une enveloppe de nanoparticules lipidiques qui lui permettent d'entrer sans être détruit dans les cellules. Ces lipides sont “stabilisés” par des molécules de polyéthylène glycol (PEG) qui recouvrent l'extérieur des nanoparticules. Ces PEG sont déjà présentes dans de très nombreux produits cosmétiques et médicaments. Les mécanismes d'anaphylaxie dus au PEG sont peu connus et ne font pas intervenir systématiquement les IgE, mais d'autres immunoglobulines et le complément (c'est pourquoi on parle parfois de réactions “anaphylactoïdes”). Une étude très récente aux États-Unis montre que dans plus de 71 % des cas, les réactions anaphylactiques surviennent dans les 15 minutes après l'injection et dans 86 % des cas, dans la demi-heure : 80 % des patients avaient des antécédents allergiques, un tiers avait déjà fait un choc anaphylactique, tous ont eu une évolution favorable après traitement adapté (dont il est impératif de disposer).

A comme “Antécédents”

Les patients ayant déjà présenté une Covid-19 doivent-ils être vaccinés ? En période de pénurie de vaccin, non dans les 6 mois qui suivent, oui après ce délai. On savait déjà que la majorité des patients infectés (pas tous) gardait des anticorps au moins 6 mois. Plusieurs études récentes réalisées dans différents pays montrent qu'ils seraient protégés à environ 80-90 % au moins sur une période de 6 à 8 mois. De plus, différentes études ont montré qu'une dose de vaccin à ARNm donnait des titres d'anticorps très supérieurs à ceux des sujets naïfs et comparables à ceux des personnes ayant reçu 2 doses. La HAS précise qu'il n'y avait pas lieu de vacciner systématiquement les personnes ayant déjà développé une forme symptomatique de la Covid-19. Aucun risque grave n'étant identifié, elles pouvaient être vaccinées si elles le souhaitaient. Il était recommandé de respecter un délai minimal de 3 mois à compter du début des symptômes et de ne pas vacciner en présence de symptômes persistants. La pénurie de vaccins et les données sur la durée de protection après infection naturelle ont fait allonger ce délai à 6 mois. Une dose de vaccin suffit, quels que soient l'âge ou la pathologie sous-jacente, à l'exception des personnes sévèrement immunodéprimées. (26/04/21)

A comme “AstraZeneca”

Le vaccin d'AstraZeneca (Vaxzevria®) est-il aussi efficace que les vaccins à ARNm ? Oui! Sur les formes graves et la mortalité! Dans plusieurs études versus comparateur, ce vaccin comportant la protéine Spike vectorisée sur un adénovirus simien non répliquant a montré une efficacité comprise entre 60 % et 90 % ainsi qu'une bonne tolérance. Cette efficacité, en apparence moindre que celle des vaccins à ARNm, est compensée par des conditions de conservation classiques entre +2 °C et +8 °C, ce qui permet son utilisation dans des cabinets médicaux, voire dans des pharmacies. De plus, son coût était nettement inférieur et il était espéré une plus grande disponibilité… à terme. Depuis, la large utilisation de ce vaccin en Angleterre et des données d'efficacité en vie réelle en Écosse ont montré plusieurs éléments très prometteurs:

  • dès la 1re dose, l'efficacité sur les hospitalisations pour Covid-19 est similaire à celle du vaccin à ARNm et avoisine les 90 %;
  • l'efficacité d'une dose du vaccin d'AstraZeneca est similaire à celle d'une dose du vaccin à ARNm de Pfizer-BioNTech à partir de J14 après la dose 1;
  • un espacement des 2 doses de vaccins à 12 semaines au lieu de 4 augmente l'efficacité.

En revanche, chez les sujets jeunes, la réacto­génicité générale (syndromes pseudogrippaux) du vaccin, assez forte, invite à prévenir les patients et à accompagner la vaccination d'administration de paracétamol, mais ne contre-indique pas la seconde dose (12 semaines après). L'Agence européenne des médicaments (EMA) et l'ANSM ont établi un lien entre les accidents thromboemboliques atypiques graves (thrombose veineuse, thrombose splanchnique, CIVD) et l'administration du vaccin AstraZeneca.

L'OMS comme l'EMA ne remettent cependant pas en cause l'excellent rapport bénéfice/risque de ce vaccin. La France limite son usage aux plus de 55 ans, le Royaume-Uni aux plus de 30 ans, d'autres pays aux plus de 60 ans; rares sont ceux qui ont interrompu la vaccination par ce vaccin à ce jour. Pour les personnes de moins de 55 ans ayant reçu une 1re dose d'AstraZeneca, la HAS recommande une 2e dose par vaccin à ARNm, 12 semaines après la 1re. Bien qu'utilisant des technologies différentes, ces 2 types de vaccin conduisent à la production de la protéine S du SARS-CoV-2, contre laquelle est dirigée la réponse immunitaire. Cette technique, qui consiste à administrer un vaccin différent à la 2e injection de celui utilisé pour la 1re, porte le nom de prime-boost hétérologue et donne des résultats d'immunogénicité au moins égaux au prime-boost homologue. (26/04/21)

A comme “Auto-immunité”

Pour la vaccination contre la Covid-19, que conseiller à nos patients ayant des maladies auto-immunes (sclérose en plaques, par exemple), avec ou sans immunosuppression, ou qui ont eu un syndrome de Guillain-Barré ? À ce jour, aucun signal d'induction ni d'exacerbation plus fréquente de maladie auto-immune n'a été identifié après vaccination. Ainsi, la vaccination pour ces patients vulnérables (sous réserve d'une immunosuppression permettant d'espérer une protection au moins partielle) est recommandée. (06/04/21)

B

B comme “Bras Covid”

Une de mes patientes a présenté, un peu plus d'une semaine après l'administration d'un vaccin à ARNm, une rougeur et une inflammation marquées au niveau du site de l'injection. Peut-on lui administrer la 2e dose ? Oui. Depuis quelques jours ont été rapportés des “gros bras” apparaissant une semaine après l'injection d'un vaccin à ARNm. Il s'agit d'une réaction d'immunité cellulaire retardée survenant en moyenne 10 jours après la vaccination, confirmée par des biopsies et disparaissant en moins d'une semaine. Ces patients ont été revaccinés sans aucune réaction lors de la 2e dose ou une réaction pas plus importante. Ce n'est donc pas une contre-indication à la 2e dose. (06/04/21)

C

C comme “Cas contact”

Puis-je me faire vacciner si je suis “cas contact” ? Si une personne est “cas contact”, la vaccination doit être repoussée: un (ou plusieurs) test virologique doit être réalisé selon les recommandations pour confirmer une infection active. Nous ne disposons pas à ce jour d'étude d'efficacité de cette vaccination en post-exposition immédiate. La vaccination pourra être réalisée si le ou les tests s'avèrent négatifs. Généralement, cela décale la vaccination de 7 à 14 jours. (06/04/21)

C comme “Coagulation”

De nombreux patients âgés ou ayant des facteurs de risque pour les formes graves de la Covid-19, premiers candidats à la vaccination, sont sous anticoagulants. Doit-on les vacciner contre le SARS-CoV-2 comme cela est indiqué, par voie i.m. ou par voie sous-cutanée (s.c.) ? Classiquement, on ne fait pas d'i.m. aux patients sous anticoagulants ou présentant des troubles de l'hémostase du fait du risque d'hématome et d'hémorragie. Cela ne doit pas s'appliquer aux vaccins. En effet, les volumes à injecter sont faibles (0,5 mL généralement, 0,3 mL pour le vaccin Pfizer-BioNTech) et plusieurs études ont montré que la vaccination i.m. dans le deltoïde, associée à une compression prolongée, est bien tolérée chez les patients sous anticoagulants. En revanche, la voie s.c. expose à une moins bonne immunogénicité (en particulier chez les sujets âgés) et à une augmentation de la réactogénicité locale. Enfin, les études cliniques d'immunogénicité et ­d'efficacité ayant conduit aux AMM ont été réalisées par voie i.m. Donc en pratique : ne pas renoncer à une vaccination i.m. en raison d'une anticoagulation, les vaccins inactivés peuvent et doivent être administrés par voie i.m., seuls les vaccins viraux vivants (rougeole-oreillons-rubéole (ROR), fièvre jaune, varicelle, zona) peuvent continuer à être injectés par voie s.c.

Pour les vaccins contre la Covid-19, bien qu'il n'existe aucune donnée pour ce type de patients, les réactions locales relativement marquées (pouvant inquiéter certains) risquent d'être fortement augmentées ; la voie i.m. paraît donc particulièrement adaptée. Les précautions sont simples :

  • toujours vacciner dans le deltoïde (plus facile à surveiller et à comprimer) ;
  • utiliser une aiguille longue et fine (les aiguilles orange et d'une longueur de 40 mm sont parfaites) ;
  • comprimer au moins 2 minutes sans masser ni frotter ;
  • surveiller la zone au décours.

C comme “Conservation”

Peut-on savoir la durée de conservation des vaccins contre la Covid-19 ainsi que les volumes à injecter et leur présentation ?

Le tableau I résume les principales caractéristiques.

C comme “Contre-indication”

En dehors de l'anaphylaxie à une dose précédente de vaccin ou à un composant du vaccin, pour qui la vaccination Covid-19 à ARNm est-elle contre-­indiquée ? La grossesse était considérée dans certains pays comme une contre-indication relative, mais une femme enceinte peut dorénavant être vaccinée. En cas de maladie aiguë modérée ou sévère, il est conseillé de retarder la vaccination de quelques jours (comme pour tous les vaccins).

D

D comme “Dette immunitaire”

La pandémie actuelle a imposé des mesures d'hygiène (distancement, masques, lavage des mains, réductions du nombre de contacts, etc.) qui ont permis de limiter la transmission du SARS-CoV-2. Elles ont aussi freiné la propagation d'autres pathogènes. Ainsi, le nombre de consultations pour pathologie infectieuse pédiatrique a diminué drastiquement, non seulement pendant les phases de confinement, mais aussi après, malgré une reprise scolaire quasi normale. Les pathologies concernées sont nombreuses. Il s'agit de pathologies courantes comme les gastroentérites, notamment à rotavirus, les bronchiolites à virus respiratoire syncytial (VRS), les varicelles, les otites… mais aussi de pathologies plus graves, comme les infections invasives à pneumocoques ou à méningocoques. Ceci n'est pas étonnant car leurs modes de transmission sont les mêmes (grosses gouttelettes et mains), avec des R0 bien inférieurs au SARS-CoV-2 pour ces 2 dernières infections. Cet effet collatéral positif à court terme est très appréciable, car il a évité les habituels pics épidémiques et le recours accru aux urgences hospitalières pendant la pandémie Covid. Cependant, ces infections, le plus souvent virales de la petite enfance, sont quasiment obligatoires dans les 1res années de vie et cette privation immunitaire pourrait avoir à distance des conséquences négatives sur le développement immunitaire des enfants avec, d'une part, une diminution de l'entraînement de l'immunité innée conduisant à une “dette immunitaire” constituée (risque d'épidémies plus importantes) et, d'autre part, un retour en grâce de la théorie hygiéniste. Certains de ces virus (rotavirus, varicelle) ou bactéries (méningocoques B et ACYW) pourraient bénéficier de la protection de vaccins non encore inclus dans le calendrier vaccinal. La France, qui a un des calendriers vaccinaux les moins étoffés d'Europe, est probablement moins bien armée pour répondre à ces rebonds épidémiques. Dans les pays en voie de développement, du fait de la baisse des couvertures vaccinales et de la surcharge des systèmes de santé, l'incidence et le poids des maladies comme la tuberculose, la rougeole ou la poliomyélite risquent d'augmenter. Même en France, le retard vaccinal créé par le 1er confinement n'a pas été résorbé en 2020, et une dette de vaccination existe, notamment pour la rougeole et la coqueluche. (26/04/21)

D comme “Délai”

Des patients âgés ou ayant des facteurs de risque sont susceptibles de recevoir d'autres vaccins (grippe, zona, pneumocoque). Quel délai doit-on respecter entre les vaccins Covid-19 et les autres vaccins ? En principe, tous les vaccins non vivants peuvent être réalisés le même jour ou avec n'importe quel intervalle de temps. En l'absence de données spécifiques et pour faciliter la surveillance en pharmacovigilance des vaccins Covid-19, il a été recommandé : 1) de ne pas administrer d'autre vaccin entre les 2 doses et 2) de respecter un délai d'au moins 2 semaines après la seconde dose. En pratique, il est rare qu'il soit urgent d'administrer les vaccins cités plus haut et ils peuvent donc être décalés. Par exemple, entre le Prevenar 13® et le Pneumovax®, le délai minimal de 2 mois peut être prolongé de plusieurs semaines, voire plusieurs mois. En cas de nécessité de vaccination urgente imposée par une contamination récente (rage, tétanos, hépatites, etc.), il n'y a pas de contre-­indication réelle, d'autant plus qu'après plusieurs centaines de millions de doses administrées, aucun signal de pharmacovigilance (hormis pour le vaccin d'AstraZeneca) n'a été noté avec les vaccins anti-Covid-19. (22/03/21)

D comme “Différents vaccins”

Existe-t-il des différences d'efficacité et de tolérance entre les 2 vaccins à ARNm ? Non ! Ces 2 vaccins sont “jumeaux” en termes de conception (vaccin à ARNm, nanoparticules lipidiques, PEG, etc.), présentent tous 2, après 2 doses, 95 % d'efficacité sur les formes cliniques de Covid-19, et ont le même profil de tolérance. Leurs seules différences portent sur leurs conditions de conservation et leurs prix.

D comme “Durée de protection après vaccination”

Combien de temps les vaccins contre la Covid-19 protègent-ils ? Une communication de Pfizer, il y a quelques jours, précise que l'efficacité de leur vaccin persiste à un excellent niveau jusqu'à plus de 6 mois : ce sont les résultats du suivi des patients inclus dans l'étude pivot : 850 dans le groupe placebo et 77 dans le groupe vacciné (91,3 % d'efficacité). (06/04/21)

E

E comme “Échec de vaccination”

Que faudra-t-il proposer aux patients qui, malgré une 1re dose de vaccin, ont fait une Covid-19 ? Il n'y a pas de réponse fondée sur des preuves. Après une dose de vaccin, si dans les 10 premiers jours aucune protection n'est observée, après ce délai, le taux de protection estimé est supérieur à 80 % (avec des intervalles de confiance étroits) : ceci signifie que, dans la majorité des cas, ces patients ont été contaminés avant le 7e jour après la vaccination. L'attitude la plus raisonnable pour eux est de les considérer comme des patients ayant fait la Covid-19. Pour les cas survenant au-delà du 10-12e jour, il paraît prudent d'explorer les causes de l'échec (immunité et séquençage de la souche) et d'appliquer la même règle.

E comme “Efficacité”

Quel est le degré de protection conféré par une seule dose de vaccin ? Il faut distinguer les vaccins à ARNm des vaccins vectorisés avec un adénovirus. Dans les 2 études de phase III sur les vaccins à ARNm, une protection supérieure à 50 % a été observée dans le mois suivant la 1re dose, mais il faut noter qu'à partir de 10 jours après celle-ci (temps nécessaire à la réponse immunitaire primaire pour se mettre en route), le taux de protection vis-à-vis de la maladie Covid-19 est de 86,7 % (IC95 : 68,6-95,4). Le délai moyen entre la contamination et les signes cliniques étant en moyenne de 5 jours, on peut penser que l'immense majorité des vaccinés sont protégés d'une contamination dès le 7e jour après la vaccination. Ces résultats ont été confirmés dans des études d'efficacité en vie réelle, en Israël, en Angleterre et en Écosse. Cependant, des incertitudes persistent quant à la durée de protection, les taux d'anticorps étant 10 à 100 fois moins élevés après 1 dose qu'après 2 doses. La vaccination complète avec 2 doses donne une protection de l'ordre de 95 %, qui a aussi été confirmée dans les études en vie réelle. Pour les vaccins avec un adénovirus, les données d'efficacité montrent une protection plus prolongée après la 1re dose. Ainsi, le vaccin Johnson & Johnson est prévu pour être administré en 1 dose (avec une efficacité sur plusieurs mois de 66 %). L'efficacité d'une dose d'AstraZeneca à 3 mois semble se maintenir.

E comme Effectiveness (efficacité en vie réelle)

La vaccination à grande échelle mise en place en Israël et en Grande-Bretagne permet de disposer désormais de données sur l'efficacité des vaccins en vie réelle. En Israël, à partir du 7e jour après la 2e dose, le vaccin de Pfizer-BioNTech se montre efficace contre la Covid-19 ainsi que pour les infections sans symptôme ; des résultats d'ailleurs homogènes pour l'ensemble des classes d'âge. Ceci suggère un effet probable de la vaccination contre la transmission du virus :

  • protection des personnes vaccinées contre une infection asymptomatique : 90 % (IC95 : 83-94) ;
  • protection des personnes vaccinées contre une infection symptomatique : 94 % (IC95 : 87-98) ;
  • protection des personnes vaccinées vis-à-vis d'une hospitalisation : 87 % (IC95 : 55-100) ;
  • protection des personnes vaccinées vis-à-vis d'une maladie sévère : 92 % (IC95 : 75-100).

Les études réalisées au Royaume-Uni ont par ailleurs évalué l'efficacité des vaccins d'AstraZeneca et de Pfizer chez les personnes âgées de plus de 65 ans, vis-à-vis des hospitalisations. Un mois après la 1re dose, elle est de l'ordre de 73 à 85 % selon ces études et s'avère comparable pour les 2 vaccins. Cette donnée est d'autant plus précieuse qu'elle renseigne sur la persistance du même degré d'efficacité contre le variant dit “anglais”, qui était majoritaire dans ces 2 études et l'est désormais aussi sur le territoire français.

E comme “Enfant”

Pourquoi les enfants n'ont-ils pas été inclus dans les études et dans les recommandations vaccinales contre le SARS-CoV-2 ? Pour 2 raisons :

  • ils présentent beaucoup moins souvent des symptômes que les adultes, et encore moins souvent de formes graves ;
  • ils sont moins contaminés et moins contaminants ; à l'évidence, ils ont joué un rôle mineur dans la dynamique de la pandémie. Cependant, des syndromes inflammatoires multisystémiques pédiatriques (MIS-C ou PIMS) proches de la maladie de Kawasaki et des Covid longs ont été rapportés.

Dès que la preuve de l'effet sur la transmission et donc sur l'immunité de groupe sera apportée et que les données de sécurité seront mieux établies, les enfants feront aussi partie des cibles de la vaccination. Des données récentes chez les adolescents de 12-15 ans vaccinés avec le vaccin Pfizer-BioNTech sont encourageantes. Cependant, la vaccination peut être discutée dès maintenant pour de très rares enfants à très haut risque de formes graves (déficit en interférons, greffés, etc.). En Israël, environ 600 enfants porteurs de facteurs de risque ont reçu à ce jour le vaccin de Pfizer-BioNTech sans effet indésirable notable. Pfizer-BioNTech, Moderna, AstraZeneca et Johnson & Johnson ont annoncé qu'ils commençaient des études cliniques chez l'enfant (dès l'âge de 6 mois).

E comme “Erreur d'administration”

Un professionnel de santé s'est aperçu en fin de séance de vaccination qu'il a administré à 10 patients 0,1 mL au lieu de 0,5 mL du vaccin AstraZeneca. Quelle doit être la conduite à tenir ? 1) D'abord et avant tout : déclarer ce cas en pharmacovigilance. 2) D'une façon générale, pour les autres vaccins, lorsqu'une dose incomplète a été administrée, la règle est de refaire une injection d'une dose complète le plus tôt possible sans tenir compte de la fraction injectée. 3) Pour les vaccins d'Astra­Zeneca, plusieurs arguments sont à prendre en compte :

  • Dans le dossier déposé à l'EMA et dans la publication du Lancet, la dose de 0,25 mL semblait être aussi efficace (voire plus, chez les sujets jeunes) que la dose de 0,5 mL, mais il n'y a pas de donnée avec 0,1 mL.
  • L'effet rappel de la 2e dose de ce vaccin paraît plus efficace, à la fois immunologiquement et cliniquement, lorsque l'espacement entre les 2 doses est de 11-12 semaines au lieu de 4-6 semaines. Une des hypothèses soulevées est que des taux d'anticorps élevés contre les autres antigènes de l'adénovirus induits après la 1re dose vaccinale diminuent la quantité de virions disponibles pour rentrer dans les cellules et exprimer l'antigène du Spike.
  • En pratique, si l'erreur a été constatée immédiatement, il faut convoquer les patients le plus tôt possible et leur administrer une dose entière. Si au contraire, on est à plus de 7 jours de l'injection, quand les anticorps commencent à apparaître, ils pourraient diminuer l'effet de cette 2e dose. Dans ce cas, il nous semble raisonnable de proposer une autre vaccination un mois plus tard avec un vaccin à ARNm pour ne pas créer de phénomène d'interférence. Exceptionnellement, une sérologie quantitative spécifique dosant les anti-Spike postvaccinaux (avant et un mois après la 1re dose de vaccin à ARNm) pourrait contribuer à comprendre.

G

G comme “Grossesse”

Peut-on vacciner avec les vaccins à ARNm pendant la grossesse ? Oui ! Les femmes enceintes ont été exclues des études cliniques initiales et, de ce fait, il n'existait pas de données spécifiques les concernant. Depuis, des données ont été publiées, démontrant la bonne tolérance, l'immunogénicité et le passage des anticorps dans le sang du cordon et le lait de mère. Ceci laisse augurer d'un certain degré de protection des nouveau-nés et des petits nourrissons. Le mécanisme des vaccins à ARNm rend peu probable qu'ils présentent un risque particulier pour les femmes enceintes : il ne s'agit pas de vaccins vivants et ils sont rapidement dégradés par les processus cellulaires normaux, sans entrer dans les noyaux. Dans différents pays plus avancés que l'Europe en termes de vaccination contre la Covid (Israël, Angleterre, États-Unis), aucun signal de pharmacovigilance n'a été détecté. Il est désormais démontré que les femmes enceintes présentant une Covid-19 symptomatique sont plus à risque d'être admises en soins intensifs (× 3) et de décéder (× 1,7). Dans une étude, les risques étaient majorés par l'âge (plus de 35 ans) ou l'existence d'une maladie cardiovasculaire.

Le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) et le Groupe de recherche sur les infections pendant la grossesse (GRIG) plaidaient pour un élargissement aux femmes enceintes, en privilégiant les vaccins à ARNm à partir du 2e trimestre de la grossesse. En effet, ces vaccins étant assez réactogènes, il est probablement inutile de déclencher ce type de phénomène en début de grossesse sans étude clinique spécifique. Le comité d'orientation de la vaccination vient de recommander de vacciner toutes les femmes enceintes à partir du 2e trimestre. Si une femme enceinte a mal toléré sa 1re dose de vaccin, il est conseillé de différer la 2e après la fin de la grossesse. Si une 1re dose a été administrée alors que la grossesse était méconnue, il n'existe aucun élément inquiétant à ce jour pour la mère et l'enfant à naître. Enfin, il n'y a aucun délai à respecter entre une vaccination contre la Covid-19 et le début d'une grossesse. (26/04/21)

H

H comme “Hygiène”

Le fait d'être vacciné permet-il de ne plus respecter les mesures barrières ? Non, pas tant que le taux de couverture vaccinale reste aussi faible ! De plus, il existe encore des incertitudes quant à l'effet protecteur des vaccins vectorisés avec un adénovirus contre les formes asymptomatiques, et l'émergence des variants doit au contraire faire renforcer les mesures d'hygiène. Le CDC précise déjà cependant que les personnes ayant reçu 2 doses de vaccins à ARNm peuvent dès maintenant se rencontrer en petit comité de personnes vaccinées, reprendre des activités sportives en salle, etc.

I

I comme “Immunité postvaccinale
ou postinfectieuse”

L'infection à SARS-CoV-2 induit une immunité très variable, qui dépend des organes touchés et de la sévérité. Par exemple, une infection essentiellement ORL peut n'induire que peu ou pas d'IgG (la présence des IgA sur les muqueuses ne dépassant pas quelques mois), l'immunité étant généralement plus forte après Covid grave ou prolongé. L'immunité induite par les vaccins à ARNm est bien plus homogène : les dernières nouvelles d'Israël montrent ainsi qu'à partir de 14 jours après la 2e dose, des efficacités très élevées, avec des intervalles de confiance très étroits contre les décès (95,1-97,6 %), les cas sévères ou critiques (97,5-98,3 %), les hospitalisations (97,1-97,9 %), les cas symptomatiques (97,4-97,9 %) et même les infections asymptomatiques (93,5-94,6 %). (06/04/21)

I comme “Immunosuppresseurs”

Les traitements immunosuppresseurs contre-­indiquent-ils les vaccins à ARNm ou vectorisés par un adénovirus ? Non ! Il ne s'agit pas de vaccins vivants. On peut craindre cependant une moindre immunogénicité et efficacité chez les patients recevant ce type de traitement, mais le vaccin sera toujours probablement plus efficace que l'absence de vaccination. Des données montrant une très faible immunogénicité chez les transplantés d'organes et les dialysés sont maintenant disponibles, d'où la nécessité de vacciner l'entourage et de mettre au point des stratégies renforcées (une 3e dose devrait être recommandée très prochainement).

I comme “Interchangeabilité”

Les vaccins disponibles sont-ils interchangeables ? Au départ non, car aucune donnée n'était disponible pour cette interchangeabilité et tout schéma vaccinal commencé avec un vaccin devait (si les vaccins sont disponibles) être continué avec le même : c'est ce schéma qui a été validé par les études cliniques et l'AMM. Cependant, les vaccins à ARNm étant très proches, ils sont considérés maintenant comme interchangeables. Enfin, des études d'inter­changeabilité, plutôt des études de combinaisons de vaccins ou de stratégie de vaccination hétérologue entre les vaccins à ARNm et vectorisés, ont débuté au Royaume-Uni. En Allemagne comme en France, on propose aux sujets de moins de 55 ans vaccinés par une dose de vaccin AstraZeneca de recevoir la 2e dose avec un vaccin ARNm 12 semaines plus tard. Cette technique, qui consiste à administrer en rappel un vaccin différent de celui utilisé pour la primovaccination, a été utilisée pour d'autres vaccins en pathologie expérimentale, porte le nom de prime-boost hétérologue et donne des résultats d'immunogénicité au moins égaux au prime-boost homologue, qui correspond à ce que nous faisons habituellement. (12/04/21)

I comme “Intervalles entre les doses”

Quel délai doit-on respecter entre 2 doses de vaccins ? Lorsque l'approvisionnement des vaccins sera suffisant, il faudra respecter les délais recommandés par l'AMM, car ce sont ces schémas qui ont été validés par des études cliniques : 3 à 4 semaines d'intervalle pour les vaccins à ARNm. Une souplesse de quelques jours sera acceptable, toujours en reculant la date de la 2e dose et jamais en l'avançant. En période d'approvisionnement difficile, le délai entre 2 doses peut, d'après l'ANSM et la HAS, être porté jusqu'à 6 semaines. Retarder (un peu) la 2e dose pourrait permettre de vacciner un peu plus de personnes, car l'approvisionnement en vaccins devrait être croissant dans les prochaines semaines ou mois. De plus, 10 jours après la 1re dose, le taux de protection est estimé pour le vaccin de Pfizer-BioNTech à plus de 80 %. Néanmoins, l'administration de la 2e dose dans un délai raisonnable est nécessaire, car les taux d'anticorps après 2 doses sont 10 à 100 fois plus élevés et des incertitudes sur la durée de protection persistent. Pour le vaccin d'AstraZeneca, un délai de 12 semaines entre les 2 doses semble augmenter l'efficacité des vaccins par rapport à un délai de moins de 6 semaines.

I comme “Israël”

Existe-t-il déjà des données confirmant l'efficacité sur le terrain (effectiveness) des vaccins contre la Covid-19 ? Oui : en Israël, où plus des deux tiers de la population “adulte” est déjà vaccinée, les résultats d'effectiveness (efficacité en vie réelle) du vaccin de Pfizer-BioNTech confirment totalement les résultats des études ayant conduit à l'AMM. On observe plus de 90 % d'efficacité pour les Covid-19 cliniques, y compris les passages en réanimation, hospitalisations, décès… Et ce, avec en prime une efficacité sur les formes asymptomatiques augurant d'un fort effet de groupe.

J

J comme “Janssen” (ou Johnson & Johnson)

J'ai entendu dire qu'un vaccin contre la Covid-19 avait démontré une bonne efficacité en une seule dose ? Oui, le vaccin de Janssen (ou de Johnson & Johnson) a obtenu l'AMM aux États-Unis et en Europe pour un vaccin vectorisé sur un adénovirus (Ad26) humain peu répandu et sans pouvoir pathogène connu non répliquant. Dans une étude comparative versus placebo comportant plus de 43 000 patients et plus de 450 cas de Covid, l'efficacité à 28 jours après une seule dose était de 66,9 % pour toutes les formes de Covid et de 85 % pour les formes graves, le tout avec une bonne tolérance. Ce vaccin se conserve plusieurs mois entre 2 °C et 8 °C, comme les vaccins habituels. Une partie de l'étude ayant été réalisée en Afrique du Sud et au Brésil, une efficacité clinique a été démontrée pour les variants sud-africains et l'un des variants brésiliens. Des résultats préliminaires montrent une efficacité contre les infections asymptomatiques d'environ 60 %. Ce vaccin étant aussi un vaccin vectorisé sur un adénovirus, l'EMA a naturellement renforcé la surveillance, en sachant qu'à ce jour, il n'y a aucune preuve d'une relation avec les rares cas d'accidents thromboemboliques pour ce vaccin (1 au cours de l'essai de phase III et 3 depuis son utilisation aux États-Unis). (12/04/21)

M

M comme “Mutation”

Les mutations du virus (en particulier les variants) peuvent-elles affecter l'efficacité des vaccins à ARMm ? Il est hautement probable que des mutations puissent, à un moment ou à un autre, toucher des régions de la Spike qui compromettront aussi l'immunité vaccinale. Les données fournies par les firmes sur la capacité des sérums de sujets vaccinés à inhiber les variants anglais et sud-africain sont très rassurantes pour le 1er, discordantes pour le 2e et modestes pour le variant brésilien. De plus, les 1ers résultats communiqués pour le vaccin de Janssen confirment une efficacité clinique sur différents variants, dont le sud-africain. Les études de phase II/III de Novavax et de Janssen, qui ont été en partie réalisées en Afrique du Sud et au Brésil alors que les variants y étaient déjà présents, montrent une perte d'efficacité clinique relativement limitée. Novavax rapporte une efficacité vaccinale de 89 % (IC95 : 75-95) dans un essai de phase III incluant 15 000 participants au Royaume-Uni, le variant 20I/501Y.V1 représentant alors plus de 50 % des souches individualisées ; et une efficacité de 60 % (IC95 : 20-80) dans un essai de phase IIb mené en République d'Afrique du Sud, où le variant 20H/501Y.V2 était très majoritaire. Leurs données suggèrent en outre qu'un antécédent d'infection protège incomplètement contre une réinfection symptomatique par ce variant.

Janssen rapporte une efficacité de son vaccin en une dose de 66 % en Amérique latine (où le variant circulant majoritaire était le B2 et non le B1) et de 57 % en Afrique du Sud (où le variant sud-africain prédominait), alors que l'efficacité est de 72 % aux États-Unis. Les laboratoires développant les vaccins à ARNm ont précisé qu'ils avaient la possibilité de modifier, en quelques semaines seulement, les ARNm de leurs vaccins pour y inclure les variants. Les essais ont démarré avec ces vaccins spécifiquement adaptés aux variants.

O

O comme “Orage”

La réaction immunitaire induite par cet ARNm peut-elle aller jusqu'à l'orage cytokinique chez certains vaccinés ? Non ! La réaction immunitaire à une infection virale ou bactérienne concerne le plus souvent non pas un antigène (comme pour la réponse contre la Spike induite par les vaccins à ARN), mais plusieurs antigènes, et elle est bien plus complexe, incluant aussi d'autres mécanismes immunitaires. De plus, la réaction cytokinique induite par l'infection à SARS-CoV-2 survient 2 à 4 semaines après l'infection ; or, sur les 35 000 vaccinés avec les vaccins de Pfizer ou de Moderna, aucun n'a présenté dans les 2 mois ce type de réaction… On peut donc être rassuré sur ce point.

P

P comme “Postexposition”

La vaccination est-elle efficace en postexposition ? Très probablement non, compte tenu de la période d'incubation courte de la Covid-19 (5 jours en médiane) et du délai entre la 1re dose vaccinale et la protection conférée par les vaccins (2 à 3 semaines).

P comme “Protection collective”

Les vaccins contre la Covid-19 confèrent-ils une protection collective ? Oui, on peut maintenant l'affirmer et l'effet de groupe sera probablement marqué pour les vaccins les plus efficaces, compte tenu de leur niveau ­d'efficacité­. On dispose d'arguments indirects et directs. Les arguments indirects sont : on ne connaît aucun vaccin dirigé contre des virus respiratoires ayant ce niveau d'efficacité qui n'exerce pas d'effet de groupe ; après une maladie Covid, les réactions de polymérisation en chaîne (PCR) sont majoritairement négatives et, lorsqu'elles sont positives, les charges virales sont souvent très faibles et non contagieuses. Les arguments directs sont :

  • quelques données préliminaires sont issues de l'étude de phase III du vaccin à ARNm de Moderna : une PCR a été systématiquement réalisée au moment de la 2e dose ; 39 ont été positives dans le groupe placebo et 15 dans le groupe qui a reçu une dose de vaccin (efficacité de 62 %). Ce résultat est rassurant, car il a été obtenu après une seule dose (la réponse immunitaire est moins forte qu'après 2 doses). Des données similaires ont été rapportées pour les autres vaccins ;
  • 2 semaines après une dose de vaccin à ARNm, la charge virale est, chez les sujets vaccinés mais positifs au test PCR (asymptomatiques), significativement moins importante que chez des sujets non vaccinés, ce qui suggère une moindre contagiosité ;
  • en Israël, les données en vie réelle montrent une protection de plus de 90 % pour les formes asymptomatiques ;
  • enfin, une étude anglaise montre que la vaccination des professionnels de santé permet non seulement de les protéger, mais aussi, de façon significative, de protéger leur famille.

L'existence de variants dont la contagiosité est plus élevée a pour conséquence la nécessité d'une couverture vaccinale plus élevée pour l'obtention d'une immunité de groupe. Plus une maladie est contagieuse, plus la couverture vaccinale nécessaire à l'arrêt de la circulation du virus est élevée. Pour les variants, il est estimé qu'une proportion de sujets immunisés supérieure à 80 % sera nécessaire pour obtenir un effet de groupe optimal.

(06/04/21)

S

S comme “Sérologie”

Faut-il faire une sérologie Covid-19 prévaccinale ? Non le plus souvent, car en population générale le taux de positivité de la sérologie reste faible et donc, en dépistage, sans s'aider de l'anamnèse, il pourrait s'agir d'un faux positif et il est difficile de savoir si le patient est protégé et pendant combien de temps. En revanche, si le patient a présenté, plus de 2 semaines avant, des symptômes suggérant la Covid-19 ou s'il a été en contact étroit avec un cas avéré positif (probabilité prétest élevée), la sérologie peut être utile : si elle est positive, il semble logique d'appliquer les mêmes consignes que si le patient avait présenté la Covid-19 avec une PCR+.

La vaccination positive-t-elle la sérologie ? Oui, si les anticorps recherchés par ELISA ou immuno­chromatographie (test de diagnostic rapide) comprennent ceux de la zone de la Spike (RDB ou S2) induits par l'injection vaccinale et si l'on est suffisamment à distance de la vaccination (2 à 3 semaines). Malheureusement, les laboratoires ne précisent pas toujours le type d'anticorps détectés et ce n'est généralement pas écrit dans les notices des tests de diagnostic sérologique rapide. Il semble que certains tests détectent spécifiquement les anticorps anti-RDB. Il faut souligner que les méthodes de dosage ne permettent pas d'évaluer correctement la protection (anticorps neutralisants) et ne sont donc pas conseillées au décours de la vaccination. Il n'y a pas à ce jour de corrélats de protection connus entre le niveau des anticorps dosés par les sérologies Covid et la protection réelle vis-à-vis de la maladie. La sérologie, quand elle est positive, traduit le contact avec le virus.

Les sérologies après vaccin Covid pour déterminer si la réponse vaccinale est suffisante sont-elles utiles ? Non ! Une sérologie postvaccinale n'a (encore) pas d'utilité en routine. Les anticorps neutralisants sont essentiels pour éviter l'infection, mais les techniques de dosage ne sont pas standardisées et les taux protecteurs ne sont pas encore connus. Même en l'absence d'anticorps, les lymphocytes T semblent jouer un rôle protecteur à eux seuls contre les complications. (06/04/21)

T

T comme “Test”

La vaccination peut-elle rendre la PCR ou les tests antigéniques positifs ? Non, en aucun cas. L'ARNm entre immédiatement dans les cellules et a une demi-vie très courte, comme la protéine Spike. Si ces tests sont positifs, c'est que le patient a été contaminé juste avant ou juste après la vaccination.

Le variant anglais positive-t-il les PCR ou les tests antigéniques utilisés habituellement pour le diagnostic de Covid-19 ? Oui le plus souvent, il faut juste vérifier que le test antigénique dépiste les nucléoprotéines et que la PCR comporte plusieurs gènes.

T comme “Thrombose”

Les vaccins AstraZeneca et Johnson & Johnson augmentent-ils le risque de thrombose ? Ces vaccins ne sont pas associés à une augmentation globale du risque d'événements thromboemboliques, notamment des phlébites et embolies pulmonaires qui en sont les 2 manifestations les plus courantes, mais à un risque d'accidents thromboemboliques atypiques mais graves. En effet, plusieurs descriptions de malades présentant un syndrome caractérisé par des thromboses atypiques et une thrombopénie ont été rapportées 1 à 3 semaines après la 1re dose du vaccin AstraZeneca puis Johnson & Johnson. L'immense majorité des patients étaient en bonne santé et ne présentaient pas de facteur de risque connu. La plupart des patients étaient des femmes de moins de 50 ans, dont certaines recevaient des contraceptifs oraux. Ces thromboses atypiques touchaient des sites inhabituels, notamment les sinus veineux cérébraux (TVC), les veines splanchniques (TVS) hépatiques ou porte. Au moment du diagnostic, une thrombopénie nette (10 000 à 110 000/mm3) était retrouvée. De plus, des taux élevés de d-dimères et de faibles taux de fibrinogène étaient fréquents suggérant une consommation. L'association de thrombose et de thrombopénie a fait penser au tableau de thrombopénie induite par l'héparine (TIH) mais aucun des patients n'en avaient reçu. Bien que la pathogénie de ce syndrome de thrombose-thrombopénie induite par la vaccination (TTIV) ne soit pas encore élucidée, certains résultats plaident pour un mécanisme proche du TIH. En effet, chez presque tous les patients, des taux élevés d'anticorps contre les complexes facteurs 4 (FP4) ont été retrouvés par ELISA et par des tests d'activation plaquettaire. Contrairement au TIH, la liaison des anticorps au FP4 s'est produite en l'absence d'héparine et la distribution des thromboses diffère clairement. Aucun signal n'avait été détecté lors des essais cliniques (comportant plusieurs dizaines de milliers de patients) et ayant conduit à l'approbation des vaccins AstraZeneca et Johnson & Johnson). L'EMA (l'Europe ayant le plus utilisé le vaccin AstraZeneca et disposant d'un système de pharmacovigilance efficace) a répertorié 231 cas possibles (169 cas de TVC et 53 cas de TVS) chez 34 millions de personnes ayant reçu le vaccin AstraZeneca, soit une incidence < 1 cas pour 100 000 vaccinés. Ce chiffre doit être considéré dans le contexte de l'incidence annuelle de la TVC dans la population générale (environ 1 cas pour 100 000 par an). Pour le vaccin Johnson & Johnson, principalement utilisé aux États-Unis, le CDC a retrouvé 15 cas sur près de 8 millions de vaccinés : tous les cas concernent des femmes, et 13 sur 15 avaient entre 18 et 49 ans. Le risque global de développer un TTIV est extrêmement faible, 1/500 000 au global, moins de 0,7 cas/100 000 chez les femmes âgées de 18 à 49 ans. Pour les vaccins à ARNm, l'incidence est inférieure à 1/1 000 000.

Les informations disponibles suggèrent que les immunoglobulines IV et les glucocorticoïdes à fortes doses peuvent améliorer la thrombopénie en quelques jours et que l'utilisation d'autres anticoagulants que l'héparine est conseillée.

Ces observations soulèvent des questions importantes ayant des implications cliniques.

  • Quel(s) composant(s) du vaccin (séquences de l'adénovirus exprimées, Spike ou autre composant) suscitent une réponse à une protéine hôte, apparemment sans rapport, la PF4 ?
  • Quel est le risque après une revaccination ?
  • Les anticorps anti-VITT ressemblent-ils aux anticorps anti-PF4 présents après une infection par le SARS-CoV-2, qui ont été décrits chez des patients présentant une TIH ?
  • La distribution atypique des thromboses est-elle liée à la localisation de l'antigène ou à la réponse vasculaire ?

Il faut rappeler la très faible prévalence (1/100 000 à 1/1 000 000 en fonction de l'âge, du sexe et des vaccins) de cette complication de la vaccination, aussi sévère soit-elle, par rapport aux bénéfices de prévention de la Covid-19 (mortalité de 0,5 à 2 %) qui peut laisser des séquelles à long terme. Néanmoins, ces TTIV justifient d'être vigilant lorsque des patients présentent des symptômes neurologiques ou abdominaux après l'administration d'un vaccin contre le SARS-CoV-2.

Un algorithme de prise en charge (sous l'égide des SFNV, SFMV et GFHT) est disponible. Les signes qui doivent faire consulter : maux de tête, douleurs abdominales, nausées ou vomissements persistant plus de 3 jours ou s'intensifiant, troubles visuels, signes respiratoires ou purpura. L'OMS comme l'EMA ne remettent cependant pas en cause le rapport bénéfice/risque de ce vaccin. La France, comme de nombreux pays européens maintenant, réserve l'utilisation du vaccin AstraZeneca ou Johnson & Johnson aux personnes de 55 ans et plus. Il est recommandé aux personnes de moins de 55 ans ayant reçu une 1re dose de vaccin Astra­Zeneca de recevoir en rappel un vaccin à ARNm. Bien qu'utilisant des technologies différentes, ces 2 types de vaccin conduisent à la production de la même protéine, la protéine S, contre laquelle est dirigée la réponse immunitaire protégeant contre la Covid-19. (26/04/21)

T comme “Tolérance”

Que sait-on de la tolérance des vaccins chez les personnes préalablement infectées par le SARS-CoV-2 ? Aussi bien dans les études cliniques précédant l'AMM que dans les données de pharmacovigilance, il n'y a aucun d'incident grave décrit, mais une réactogénicité plus importante a été rapportée.

V

V comme “Variant”

Doit-on s'inquiéter de l'émergence de nouvelles souches ou variants ? Oui ! mais il ne faut pas céder à la panique médiatique concernant les variants. La situation épidémiologique est marquée dans le monde par l'émergence de nombreux variants préoccupants (VOC, ou Variant of Concern). Comme de nombreux virus respiratoires, le SARS-CoV-2 mute en permanence. Il s'agit d'erreurs de lecture de l'acide nucléique, le plus souvent sans conséquence, mais qui parfois peuvent apporter un avantage écologique au virus. Une mutation déjà ancienne sur la protéine Spike (G-614 au lieu de D-614) avait déjà conféré une plus grande transmissibilité aux souches circulantes en Occident comparativement à la souche originelle chinoise. Un variant est un sous-type de virus dont le génome diffère par plusieurs mutations par rapport au virus de référence qui modifient ses propriétés biologiques. Les VOC sont ceux qui entraînent une plus grande transmissibilité et/ou une plus grande gravité et/ou une résistance au vaccin et/ou une modification des performances des tests permettant le diagnostic. Une lignée est un ensemble de virus descendants d'une même souche ancestrale. Ce qu'il faut bien comprendre, c'est que les mutations se produisent d'autant plus que la circulation virale est intense, prolongée, et probablement que les populations affectées ont une immunité moins bonne. Ces variants comportent tous de multiples mutations, mais les plus marquantes concernent la protéine de pointe ou Spike modifiant sa forme et lui conférant une plus forte affinité sur le récepteur ACE2 (la clé rentre mieux dans la serrure) avec, pour conséquence, plus de cellules infectées et des charges virales plus élevées responsables:

  • d'une plus grande transmissibilité : c'est la règle pour tous ces variants et c'est l'avantage écologique principal en l'absence de vaccination. Les sujets infectés sont plus infectants et sur des périodes plus prolongées, d'où l'allongement des périodes d'isolement imposées;
  • d'une plus grande gravité : les études donnent des résultats contradictoires, mais il est logique de le penser en présence de charges virales plus élevées;
  • d'un échappement à l'immunité acquise soit par la maladie naturelle liée à un virus initial, soit par la vaccination, mais les données sont très parcellaires. Il est cependant logique de penser que la conjonction d'une réplication virale intense du fait d'un pic épidémique et d'une immunité de groupe partielle risque de sélectionner des variants plus ou moins résistants à l'immunité.

De très nombreux variants ont été rapportés dans le monde, mais ils convergent vers quelques lignées se ressemblant beaucoup et 4 d'entre eux sont sous surveillance renforcée. Après le variant anglais devenu prédominant en Europe, les variants sud-africain et brésilien, est venu s'ajouter, ces dernières semaines, le variant indien. Chacun d'eux est impliqué dans les grandes vagues épidémiques. Certes, le non-respect des gestes barrières sur la durée, l'utilisation pour le moins non optimale des tests diagnostiques et surtout les conclusions et attitudes à adopter en cas de positivité, des campagnes de vaccination trop lentes, ont sans nul doute un rôle important dans l'émergence de ces rebonds successifs. La lutte contre la pandémie ne peut se dispenser d'aucune de ces mesures.

En France, alors que les variants sud-africain et brésiliens ont été isolés depuis plusieurs mois, leurs proportions parmi les souches isolées n'ont pas augmenté de façon significative et le variant anglais est resté prédominant, témoignant probablement d'une plus grande transmissibilité. La pression de sélection vaccinale pourrait changer la situation. Cependant, une vision cataclysmique des variants qui viendraient empêcher un contrôle de l'épidémie est inutile, contre-productive et pas le scénario le plus probable. En effet, le SARS-CoV-2 a un répertoire de mutations relativement limité et ce sont un peu les mêmes mutations qui apparaissent partout dans le monde mais dans des ordres différents. La technologie des vaccins à ARNm va permettre de les adapter très rapidement. L'idée est de surveiller les nouveaux variants, d'identifier les mutations préoccupantes afin de les introduire dans ces vaccins pour fabriquer une dose de rappel (tableau II).

La conséquence majeure de variants plus transmissibles est l'augmentation du R0. La proportion de gens immunisés, nécessaire pour obtenir un effet de groupe (1-1/R0), passe de 60-70 % à > 80 %. Il faut bien intégrer plusieurs données en apparence contradictoires:

  • la vaccination associée aux autres mesures, en empêchant l'infection ou en réduisant le nombre de cas, est la meilleure façon de limiter la réplication virale donc les mutations et l'émergence de variants ;
  • certains variants sont surreprésentés dans les échecs de vaccination, alors que les vaccins gardent une activité très significative contre ces variants : ceci témoigne d'un échappement partiel à l'immunité vaccinale ;
  • même si des clusters surviennent, la gravité des cas cliniques semble moindre ;
  • il n'est pas exclu que la vaccination puisse exercer une pression de sélection permettant aux variants résistant aux vaccins de prospérer.

L'immunité de groupe obtenue uniquement par l'acquisition de la maladie par une proportion importante de la population est peu probable du fait de l'émergence de variants et d'une durée relativement brève de l'immunité chez une proportion des infectés. La vaccination avec des vaccins adaptés aux variants sera très probablement nécessaire.

  • Les fabricants de vaccins ont annoncé qu'ils étaient capables d'adapter leurs produits aux souches circulantes en quelques semaines, voire de produire des vaccins couvrant l'ensemble des variants existants. (26/04/21)

V comme “Variant anglais”

Le variant anglais est-il plus dangereux que les souches circulant antérieurement ? Oui ! Le variant anglais présente en plus une mutation dans le domaine de liaison au récepteur de la protéine S en position 501 (acide aminé “asparagine” remplacé par la “tyrosine”), ainsi que plusieurs autres mutations et délétions (8 sur la Spike et une dizaine sur d'autres protéines). Ce variant, comme le variant sud-africain, est clairement, à tout âge, plus transmissible (1,4 à 1,8 fois plus que les 1ers SARS-CoV-2) et il a progressivement supplanté les autres en Europe, en Israël, etc., du fait de cet avantage écologique. En France, il est largement prédominant depuis février 2021. Les données concernant une augmentation de la proportion de formes plus sévères sont discordantes, mais plaident pour une plus grande gravité. Quoi qu'il en soit, étant plus transmissible, on peut s'attendre à plus de cas symptomatiques et plus de formes graves. Il ne semble pas qu'ils échappent à l'immunité induite par une précédente infection ou aux anticorps monoclonaux ou à la vaccination. En pratique, ce variant doit imposer le renforcement des mesures d'hygiène et l'accélération des programmes de vaccination.

V comme “Variant sud-africain”

Doit-on s'inquiéter de l'émergence du variant sud-africain ? Oui ! Ce variant B.1.351 est 1,5 fois plus transmissible que les souches circulant auparavant et est associé à une augmentation de la létalité. Les études sur la transmission et les impacts de ce variant sur les manifestations cliniques, les hospitalisations, les décès et les réinfections sont limitées. Les vaccins et traitements par anticorps monoclonaux approuvés par les agences réglementaires seraient moins efficaces contre ce variant que contre les variants communs, notamment le vaccin d'AstraZeneca. De plus, ce variant serait moins sensible aux anticorps neutralisants du plasma de convalescents pour la Covid-19 (événement qualifié d'évasion immunitaire), ce qui soulève des inquiétudes quant aux risques accrus de réinfection. Il semble cependant que l'immunité cellulaire soit moins touchée. En ce qui concerne les vaccins :

  • pour le vaccin AstraZeneca, les résultats semblent discordants : pas efficace en Afrique du Sud, plus efficace en Angleterre ;
  • pour le vaccin Pfizer-BioNTech, une partie de l'étude pivot a été faite en Afrique du Sud avec un résultat satisfaisant ;
  • pour les vaccins Johnson & Johnson et Novavax, une baisse de l'efficacité clinique a été notée, mais n'atteint pas la significativité.

Des essais cliniques visant à tester l'efficacité d'une 3e dose ou de vaccins développés spécifiquement contre ces variants ont été annoncés par les fabricants Pfizer-BioNTech et Moderna. (06/04/21)

V comme “Variant brésilien”

Doit-on s'inquiéter de l'émergence du variant brésilien ? Oui ! Ce variant (P.1) semble aussi plus transmissible et plus virulent. Cependant, les données sur la transmission, la sévérité des manifestations cliniques, les réinfections, l'efficacité des vaccins et des anticorps monoclonaux sont limitées. En raison de mutations partagées avec le variant sud-africain, une diminution de l'efficacité des vaccins est anticipée, mais non démontrée. (06/04/21)

V comme “Variant et enfants”

Les variants comme le variant anglais sont-ils plus transmissibles chez l'enfant que chez l'adulte ? Non ! Les variants sont plus contagieux à tout âge et les enfants infectés avec les variants sont d

Tableau I. Caractéristiques principales des vaccins Pfizer-BioNTech, ­Moderna, AstraZeneca et Janssen.

PrésentationConservation
Pfizer-BioNTechMultidose : 5 doses jusqu’à 6, voire 7 doses
0,3 mL/dose
−70 °C et 5 jours entre 2-8 °C
Un dossier est déposé à la FDA pour une conservation entre −25 et −15 °C (février 2019) comme le Moderna
ModernaMultidose : 10 doses jusqu’à 11 doses
0,5 mL/dose
−25 et −15 °C
et 30 jours entre 2 et 8 °C
AstraZenecaMultidose : 10 doses, jusqu’à 12 doses
0,5 mL/dose
Entre 2 et 8 °C
6 mois
JanssenMultidose : 5 doses
0,5 mL/dose
Entre 2 et 8 °C
3 mois

(06/04/2021)
Tableau II. Caractéristiques des trois principaux variants..

Nom du variantPremier casMutations caractéristiquesPréoccupationsRésistance aux vaccins existants
B.1.1.7
(23 mutations, 17 changements d’acides aminés)
Angleterre Septembre 2020Délétion 69-70
N501Y
DG614
Transmissibilité-contagiosité
Virulence
Difficultés diagnostiques par PCR
Non ou très faible
B.1.351
(23 mutations, 17 changements d’acides aminés)
Afrique du Sud Octobre 2020K417N
E484K
N501Y
DG614
Transmissibilité-contagiosité
Évasion immunitaire après maladie
Oui pour AstraZeneca pour les formes non graves
Diminution modérée probable pour les autres : Johnson & Johnson Novavax et Pfizer-BioNTech
P.1
(35 mutations, 17 changements d’acides aminés)
Brésil/Japon Janvier 2021K417T
E484K
N501Y
DG614DG614
Transmissibilité-contagiosité
Virulence
Évasion immunitaire après maladie
Possible diminution de l’efficacité mais données très parcellaires
B.1.617IndesE484Q
L452R
P681R
Transmissibilité-contagiositéPossible diminution de l’efficacité mais données très parcellaires

Références

www.infovac.fr


Liens d'intérêt

R. Cohen déclare avoir des liens d’intérêts avec GSK, MSD, Pfizer, Sanofi.

M. Lefebvre, O. Launay, D. Pinquier, I. Hau, C. Weil-Olivier, P. Bégué, P. Bakhache, M.A. Dommergues, V. Dufour, J. Gaudelus, H. Haas, O. Romain, G. Thiebault, F. Vie le Sage et C.A. Siegrist n’ont pas précisé leurs éventuels liens d’intérêts.